Au Canada - Histoires de Sexe

Au Canada

... dégueulasse…
— Mais non, il y en a la moitié pour toi !
— Ah oui, merde ! Oh, mais c’est super ! Quarante-cinq mille sans rien faire ? J’arrête tout…
— Oui, je te comprends. Tu vois le problème du paternel, plus il investissait, plus ça rapportait, plus il était imposable et plus il devait défiscaliser. Un manège infernal. Et pourtant il n’en profitait même pas. Jamais de vacances, ou alors il nous emmenait avec Béa et retournait bosser… Si, sur la fin, un peu de golf et de chasse, mais il n’en profitait pas vraiment puisque c’était pour trouver de nouveaux marchés. Une vie de dingue au service de l’argent. Certes, je ne m’en plains pas, mais je ne veux pas faire pareil.
— Là, je te comprends. En même temps, j’aime bien ce que je fais, mais quand je rentre crevée, que je vois ma tronche dans la glace et les rides arriver, je me dis que je suis conne. J’aurais été maîtresse d’école comme en rêvent toutes les petites filles, j’irais bosser à neuf heures, je finirais à seize heures trente, j’aurais le mercredi et j’aurais seize semaines de vacances par an… Putain le pied !
— Bah, ne regrette rien, il s’agit surtout de faire quelque chose qu’on aime.
— Ouah là là ! Je n’en reviens pas… Mais si on meurt tous les deux, exemple : notre avion se crashe. Qui va en bénéficier ?
— Un, on sera morts ensemble et c’est le mieux qui puisse nous arriver. Deux, on n’en aura plus rien à foutre de ce pognon. Trois, je pense que le notaire coulera une retraite heureuse !
— Ouais, OK, ...

... t’as raison. On s’en fout. Le mieux, ce serait d’en profiter tant qu’on peut.
— Voilà une bonne conclusion. Tiens, je t’ai fait une fiche avec tous les éléments, les numéros de téléphone, les codes et les coordonnées du notaire.
— Ben vrai ! C’est un super cadeau de noces avant notre voyage de noces, sans noces.
— Je crois que ça aussi on s’en fout, non ? Si on allait faire l’amour ?

Le voyage Paris-Montréal, c’est déjà long. Montréal-Vancouver, c’est long aussi. Mais les deux enchaînés avec une courte escale à Trudeau, c’est interminable. « Chiantastique », dit Gwen. Pour couronner le tout, l’arrivée sur Vancouver est assez décevante. Oui, il y a la surprise de la côte après les montagnes, mais on ne voit du ciel qu’une ville de buildings comme toutes les villes d’Amérique du Nord. Ma Gwen fait la moue, pour ne pas dire la gueule. J’ai beau lui dire d’attendre d’être au sol pour porter un jugement, elle n’est pas persuadée.

Je craignais de tomber sur son ancien amant, le pilote de ligne, mais nous y avons échappé. Ouf ! Pourvu qu’il en soit de même au retour. Je lui concède volontiers d’avoir eu une vie avant moi, mais je n’aimerais pas y être directement confronté. J’ai pris un bon hôtel, depuis que j’ai les moyens, avec balcon et vue sur la baie d’un côté, sur les montagnes enneigées de l’autre. Nous sommes partis de France où il faisait trente-cinq, ici il ne fait que vingt-deux. Agréable. Au fil des balades, à pied ou en taxi, la moue de ma chérie se transforme en ...