Version française - Histoires de Sexe

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... reprit son argumentation.

— Nous sommes bien d’accord. Seulement voilà, ce type de programme se destine à un public qui recherche des émotions, disons… assez classiquement formatées. Et j’ai bien peur que votre doublage ne les parasite plutôt qu’il ne les susc…ite.

À la façon dont elle avait laissé traîner ses incisives sur la première syllabe sifflante du dernier mot, je me dis qu’elle était soit vraiment salope, soit vraiment perturbée.

Perturbé, je l’étais moi-même. J’avais une furieuse envie de fuir.

Mais aussi une étrange envie de rester. Les effluves discrets de son parfum végétal me chatouillaient les narines. Plus je la regardais, plus je la trouvais attirante. Je ne sais pas ce qui m’a pris. Peut-être une volonté d’aggraver mon cas. Il y a des gens qui, quand ils sont acculés, font l’autruche. Moi, je fais plutôt l’andouille. Sur un malentendu, parfois ça peut marcher, paraît-il.

— Tabarnak, j’en reviens po-ah ! T’en veux-tu pas de mon film ? C’était crissement beau, pourtant !

Aussitôt un sourire ravageur éclaira son visage. Comme un domino qui tombe entraîne une réaction en chaîne, elle partit dans un fou rire totalement incontrôlé. Elle riait en se balançant sur l’assise du canapé, les répliques déferlaient en vagues d’hilarité successives, sans faiblir, et il fallut un temps fou pour qu’elle reprenne à peu près sa contenance.

— Désolé de vous avoir fait perdre votre temps. Je crois bien comprendre que je suis le maillon faible…
— Mais ...

... non, mais non, je vous assure ! Vous avez déjà réussi un exploit avec cette projection : me faire rire comme je ne l’ai plus fait depuis une éternité ! D’abord intérieurement, c’est vrai. Voilà bien cinq minutes que je lutte pour garder mon sérieux, en me mordant la langue. Une vraie torture !
— Vous ne m’en voulez pas, alors ?
— Au contraire ! Et puis, je vois trois raisons qui m’invitent à vous accorder ne fût-ce qu’un sursis !
— Et quelles sont-elles ?
— D’abord, autant votre pornax est lamentable, moche, mal écrit, mal joué, mal éclairé et mal filmé, autant il y a dans sa profonde ringardise quelque chose qui m’intéresse, ne me demandez même pas quoi. Appelons ça l’instinct.

À cet instant précis, la voix de Momo résonna dans les haut-parleurs.

—C’est tout pour aujourd’hui ? C’était plutôt sympa, non ? J’ai pas tout compris, mais la nénette est canon.
— Qu’est-ce que je vous disais ? sourit-elle.
— Que ferais-je sans Momo ? L’homme providentiel…
— Ensuite, c’est un bien beau geste que vous faites là envers votre camarade, et si j’ai probablement la réputation d’être une vraie garce, il m’arrive encore parfois de me rappeler que j’ai un cœur.
— Merci pour lui. Rétrospectivement, je ne suis plus certain qu’il le mérite.
— Quant à la troisième raison…

Elle marqua à nouveau une pause, qui me sembla cette fois bien moins calculée.

— … j’aime décidément beaucoup votre voix.

Le regard qu’elle plongeait dans le mien n’était pas aguicheur, mais curieux et ...