Fauteuils de cuir et peau de vache
Datte: 11/06/2018,
Catégories:
autostop,
Humour
coupfoudr,
Auteur: Guust, Source: Revebebe
... moment où je flanchais.
J’ai baissé les yeux.
— Je suis vraiment stupide. Stupide et grossier.
Tania m’a tourné le dos et s’est éloignée vers le coin cuisine.
— Je vais faire un peu de café. Vous en voulez ?
— Ne vous dérangez pas pour moi.
— Il n’y a pas de dérangement.
Je l’ai regardée qui s’affairait devant la cafetière électrique. Je la trouvais très belle. Très belle et inaccessible. J’avais tout gâché.
— Je peux m’en aller, si je vous importune, ai-je dit.
Elle est revenue vers moi. J’ai vu ses yeux noisette, ses petites taches de son. L’expression de son visage s’est faite soudain plus douce.
— J’aimerais que vous restiez encore un peu, si ça ne vous ennuie pas…
J’ai tourné la tête un instant vers la porte. Mathieu devait s’être esquivé.
— Vous pensez qu’il est toujours là ?
— Qui sait ?
— Il vous importune vraiment ?
— Il est gentil, mais collant. Il fait le trajet en bus en même temps que moi, tous les jours au matin. Le soir, j’arrive parfois à l’éviter en prenant le suivant, mais c’est à croire qu’il le sent.
— Il est sans doute parti, maintenant.
— Probablement, mais je préfère ne pas courir une nouvelle fois le risque de vous faire sortir trop rapidement. Il est capable de guetter derrière un coude de l’escalier ! Asseyez-vous donc !
— Acceptez mes fleurs, alors, ai-je répondu d’une voix plaintive.
J’ai entendu le rire clair de Tania, au moment où elle prenait le bouquet de roses.
— Vous êtes drôle, Joseph !
— Vous ...
... trouvez ?
Je me sentais plutôt ridicule, mais le retour de son rire m’avait fait chaud au cœur.
— Vous pouvez vous asseoir, à présent. Et enlevez donc votre veste, vous avez l’air coincé, comme ça !
«Mais je suis coincé » ! ai-je eu envie de lui répondre. Pourtant, je me suis exécuté sans rien dire, pendant qu’elle mettait les roses dans un vase et le vase sur la table de la salle à manger, tout près de moi. Je l’ai regardée qui repartait vers le coin cuisine.
Je la trouvais merveilleuse, et j’aurais donné n’importe quoi pour qu’elle me pardonne, pour qu’elle ne me jette pas dehors tout de suite. J’étais assis de biais, accoudé au grand côté de la table, les genoux contre l’extérieur du pied.
— Je vous sers un petit café ?
— Oui, bien sûr… avec plaisir.
J’espérais qu’il serait brûlant. Si brûlant qu’il me faudrait une heure pour le boire ! Elle a apporté les tasses sur un plateau, avec du sucre et une petite bouteille de lait.
— Vous le buvez sucré ?
— Juste un peu de lait, s’il vous plaît, ai-je répondu.
J’ai trempé les lèvres dans le liquide brûlant.
— Il est bon, votre café.
— Merci.
— Et elles sont jolies, vos tasses.
— Vous trouvez ?
— Oui.
Elle s’est assise de l’autre côté du coin de la table.
— C’est vous qui me les avez offertes.
— Moi ? Mais…
Elle m’a souri, a secoué la tête d’un air moqueur, alors j’ai compris.
— Ce sont les tasses du…
— Oui.
— Pas possible !
— Mais si ! Ça vous étonne ?
J’étais loin de penser à ça. ...