Harmonie du soir - Histoires de Sexe

Harmonie du soir

... comme s’il espérait d’un seul regard pouvoir y mettre le feu, une bonne fois pour toutes. Peut-être était-ce la meilleure solution. Tant pis pour l’héritage intellectuel de Diana, après tout, on avait recherché son cahier pendant des années ; et il n’avait contribué qu’à augmenter le fossé entre lui, et ses adversaires épris de vengeance. Il ne causait que le mal autour de lui.

Mais quelqu’un l’avait donné à Liana. Pourquoi ? Il y avait certainement une raison. Bien sûr, Tomaze était satisfait de posséder enfin ce qu’il rêvait de récupérer depuis deux mois ;depuis toujours – mais il ne pouvait s’empêcher de penser à Liana, au fait qu’« on » le lui avait confié, à elle. Pourquoielle, bon sang ?

Une autre chose torturait son esprit – et son âme, par la même occasion. Liana lui avait jeté ce journal au sommet de sa fureur, et elle l’avait fait pour une raison bien précise. Elle avait eu recours à ce dernier subterfuge pour tenter de découvrir enfin la vérité ; en lui envoyant ce cahier de toutes ses forces, c’était comme un appel qu’elle lui envoyait, tout aussi violent. Une réponse, c’est ce qu’elle voulait. Elle cherchait à savoir si l’intérêt de Tomaze à son égard n’avait été stimulé que par le désir de mettre la main sur le journal.

Et lui, sombre idiot fonçant front en première ligne, à toute vitesse contre le mur de briques, n’avait rien compris, et lui avait involontairement fourni une réponse : il était parti avec.

Et cette idée lui répugnait, l’enrageait ...

... même. Quoi ? Était-il réellement cet homme sans scrupules qui avait charmé une jeune femme pour accéder à un objet, afin de protéger son passé et ainsi de pouvoir dormir la conscience tranquille ? Avait-il vraiment fait ça ? Avait-il jeté au feu tous ses principes, tous ses serments, dans le seul but de redorer son blason, de ne pas montrer à cette candide jeune femme à qui elle avait vraiment à faire ?

Quelle bassesse, et quelle dérision. Tout cela était si illusoire. Comment pourrait-il se regarder dans un miroir sans éprouver du dégoût, après ça ? Il avait trop souffert de la culpabilité et du remords, pour continuer dans cette nouvelle vie qu’il s’était créée de toutes pièces.

Peut-être était-il en train de gâcher sa seconde chance. Peut-être même la détruisait-il consciemment de lui-même. « Au diable ce qu’elle risque de penser de moi dans le futur », songea-t-il alors. « Le principal, c’est ce qu’elle pense de moimaintenant. Si je lui redonne le cahier de mon plein gré, peut-être aura-t-elle enfin confiance en moi. Et me le remettra avec joie si je le lui demande. »

— Encore vous ?

Visiblement, elle avait beaucoup bu. Et beaucoup pleuré, aussi. Ses yeux étaient rouges et gonflés.

— Allez-vous s’en, ajouta-t-elle d’une voix râpeuse.

Mais Tomaze, prévoyant, avait déjà coincé son pied dans l’embrasure de la porte.

— Il faut qu’on parle, dit-il avec sérieux. Cessez de vous conduire en gamine mal élevée.
— On s’est tout dit, objecta-t-elle d’une voix ...