1. Harmonie du soir


    Datte: 07/05/2018, Catégories: nonéro, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... gravement.
    — Ouais. Mais Einstein pensait-il que nous allions fabriquer des bombes si meurtrières qu’elles pourraient détruire toute vie sur terre, avant d’inventer sa théorie sur la relativité ? L’enfer est pavé de bonnes intentions ! riposta-t-elle brutalement.
    
    Il y eut un court silence. Tomaze dévisageait la jeune femme avec une intensité déroutante.
    
    — C’est ce que vous croyez, Liana ? répliqua-t-il avec lenteur. C’est vraiment ce que vous croyez ?
    
    Le regard que Liana lui lança était suffisamment univoque.
    
    — Alors parlons-en, des intentions, penchons-nous sur les vôtres : je serais curieux de connaître celles qui ont motivé notre rencontre. Pouvez-vous m’affirmer, sans aucune hésitation, que vos intentions à mon égard n’étaient nullement intéressées – pour ainsi dire – tout à fait bonnes ?
    
    Liana recula, sans cesser de le fixer droit dans les yeux. Mais quelque chose s’était allumé dans son regard. Tomaze venait d’avoir sa réponse.
    
    — Vous m’en voyez ravi, conclut-il. Pendant un instant, j’ai cru vivre une rencontre du troisième type avec Mère Teresa, un modèle de vertu.
    — Partez, dit-elle d’une voix très basse.
    
    Il ne bougea pas d’un poil, se contentant de la transpercer de son regard aigu. Mais elle secoua la tête, ses yeux toujours dans les siens :
    
    — Je vous ai dit de partir ! (sa voix se mit à ronfler, vibrante de colère) Partez, foutez le camp de chez moi ! Vous avez votre précieux journal, alors maintenant,déguerpissez !
    
    Elle rompit ...
    ... soudain le contact visuel, se projeta contre lui, et le poussa de toutes ses forces en direction de la porte. Tomaze se laissa faire, soudain attristé sans savoir pourquoi. Il lui lança un dernier et long regard, avant qu’elle ne l’expulse de chez elle sans aucun ménagement ; la porte claqua derrière lui avec un choc à en faire vibrer les murs.
    
    Une fois dehors, l’air frais de la nuit sembla le tirer de l’espèce de torpeur qui l’avait engourdi durant de longues minutes. Il s’arrêta sur les marches de l’immeuble, hésita. Levant les yeux, il s’aperçut que la voûte apaisée du ciel, constellée d’étoiles, n’était nullement en diapason avec la peine qu’il ressentait, au plus profond de son être.
    
    Avec une telle détresse au fond du cœur, comment ne pas imaginer autre chose qu’une pluie diluvienne ou un orage dévastateur ? Mais non, la nuit était claire, belle, et calme. Aucun élément n’était en harmonie avec la tempête de ses émotions.
    
    Il regarda le cahier qu’il tenait entre ses doigts serrés. La couverture cartonnée brillait à la lumière de la lune. Toute cette histoire pour un misérable tas de feuillets, couverts de l’écriture brouillonne de Diana. Diana qui était morte depuis si longtemps. Cela ferait vingt ans tout ronds, cette année.
    
    Avec lenteur, Tomaze se pencha, et s’assit sur les marches, songeur. Il resta là un long moment, sans se soucier du froid qui envahissait ses membres, des crampes qui paralysaient ses fesses et ses doigts. Il fixait le cahier, entre ses mains, ...
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