1. Vraimodo


    Datte: 28/12/2019, Catégories: fh, amour, Auteur: Guust, Source: Revebebe

    ... désinfectants et le claquement des sandales des infirmières dans le couloir ne tardent pas à me renseigner sur l’endroit où je me trouve. Au lieu de crever dans le lit d’une rivière, je survis dans un de ceux de l’hôpital. Je me remémore les dernières images, les derniers bruits avant ma perte de conscience…
    
    Quelle idée de me jeter dans le canal ! J’aurais dû me douter que la mort par noyade n’a rien de folichon, et que j’allais gueuler comme un porc à l’abattoir en buvant la première tasse d’eau sombre et froide ! Je me rappelle d’un bruit de voix, de quelqu’un qui hurle d’arrêter de me débattre et qui me balance même une mandale pour que je me calme… et puis plus rien. Le trou noir. Mais apparemment, ce n’est pas fini. Je regarde autour de moi, et m’aperçois que le second lit est inoccupé. Ils ont sans doute eu peur de me mettre avec quelqu’un d’autre.
    
    La porte de la chambre s’ouvre, et une infirmière entre, suivie de deux dames.
    
    — Voilà, dit-elle. C’est ce monsieur que vous avez sauvé de la noyade.
    
    Elle ne le dit pas pour rire. Mes antécédents ont dû transpirer quelque part. Elle me regarde :
    
    — Soyez assez aimable pour remercier madame. Sans son intervention, vous y passiez ! Je sais que c’était sans doute votre objectif, mais quoi que vous en pensiez, la vie vaut la peine d’être vécue !
    
    Et sur ces paroles aimables, elle quitte la chambre, me laissant seul avec mes visiteuses. Qu’en sait-elle, que la vie vaut la peine d’être vécue ? Elle n’est pas ...
    ... moche, elle !
    
    Je regarde les deux femmes. La première est jeune, mince, d’allure sportive, plutôt jolie, avec des cheveux clairs et lisses, mi-longs, noués sur la nuque par un élastique. Des traits fins, des yeux gris et fureteurs, des pommettes colorées et l’air de rythmer profondément sa respiration avant de prendre le départ d’une course à pied. Elle est d’ailleurs vêtue d’un ensemble style « jogging », avec chaussures à l’avenant et petite veste coupe-vent.
    
    — Je pensais que vous étiez tombé à l’eau par accident, m’annonce-t-elle d’une voix bien timbrée, mais l’infirmière m’a expliqué certaines choses à votre sujet…
    
    Elle se tait, me regardant d’un air sévère.
    
    — Vous regrettez votre intervention ? je lance, amer.
    
    La réponse fuse :
    
    — Pour qui me prenez-vous ? Même si j’avais deviné qu’il s’agissait d’une tentative de suicide, je n’aurais pas agi autrement. Vous n’avez pas le droit de faire ça. C’est de la lâcheté. La vie est un bien trop précieux que pour en faire bon marché.
    
    Elle a tout jeté d’un trait, mais elle ne semble même pas essoufflée. D’ailleurs elle continue sur sa lancée :
    
    — Vous pensez sans doute qu’il faut du courage pour oser mettre fin à ses jours, mais il en faut très peu. Juste une seconde de bravoure, quand on saute à l’eau, quand on craque l’allumette ou qu’on appuie sur la gâchette ; mais tout le reste n’est que couardise. Il faut affronter son existence, et non la fuir.
    
    Je vois ses joues rosir, ses yeux étinceler tandis qu’elle me ...
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