La lettre d'Élise...
Datte: 15/11/2019,
Catégories:
fh,
inconnu,
vacances,
strip,
odeurs,
pénétratio,
portrait,
poésie,
coupfoudr,
Auteur: Louise Gabriel, Source: Revebebe
... derrière les vitres, il l’avait vue se déshabiller, se réchauffer devant l’âtre, s’installer pour dessiner puis disparaître de son regard, il avait changé de lieu d’observation, s’était dirigé vers l’autre fenêtre. Oh ! pas très fier, c’est vrai, de se retrouver voyeur, mais dans l’incapacité de quitter le spectacle qu’il lui était donné de contempler.
Cette danse charnelle autour de l’instrument, ses lenteurs, ses regards jetés à la dérobée, ses envols fougueux, sa fragile nuque ployée, le ballet de ses longs cheveux sombres, la couleur de sa peau, sa frénésie parfois, son excessive douceur avec l’archet… la totalité du spectacle l’avait fasciné, subjugué, et il s’était même mis à bander plus que de raisonnable, un peu honteusement aussi. Il était un intrus dans ce moment-là, dans cette fusion symphonique. Il n’avait plus rêvé que d’une chose, être sous ses mains à la place du violon, et qu’elle joue ses gammes sur ses étendues épidermiques avec la même fougue. Il but son chocolat, grignota du bout des dents une ou deux galettes, il était loin d’être mort de faim. Il prit le livre qu’il avait emporté avec lui, et dont il repoussait depuis si longtemps la lecture, «La Montagne magique » de Thomas Mann. La sérénité de l’endroit se prêtait au plongeon dans ce genre d’ouvrage. La tête calée dans les oreillers, les couvertures remontées jusqu’au menton, il partit en voyage sur les mots de monsieur Thomas…
Son excursion sur les falaises, la douche, la douceur chaleureuse ...
... de la boisson chocolatée, le moelleux de la couette, eurent raison de sa détermination pour la lecture : après trois pages il s’était assoupi.
Quand il se réveilla au petit matin, il constata qu’il avait oublié d’éteindre sa lampe de chevet, qu’il avait grandement saccagé une bonne partie des pages de son livre. C’est vrai, il avait fait des rêves insensés, la brune violoncelliste ne l’avait pas quitté de la nuit, il lui avait fait subir les pires outrages, quasi inavouables, les plus purs délices. Il avait la bouche pâteuse comme après une bonne cuite ; il s’était enivré d’elle jusqu’au délire. Bon sang, parfois les rêves ont la vie dure.
Il fila dans la salle de bain après un rapide coup d’œil par la fenêtre. Le temps s’annonçait plus clément aujourd’hui, le soleil avait décidé de faire mentir Madame Madeleine, elle qui lui disait pas plus tard qu’hier soir qu’à chacune de ses venues il ne cessait de pleuvoir. Décision fut prise, il partirait pour la journée, arpenterait la falaise avec son appareil photo, avec dans un coin de la tête le secret espoir de rencontrer la belle inconnue.
Il s’habilla chaudement, malgré tout le climat était changeant ici, même si le soleil brillait généreusement le vent n’avait pas cessé de souffler, et sur les hauteurs il pouvait être glacial à cette période de l’année. Il descendit prendre son petit déjeuner. Il crevait de faim, entre le dîner frugal s’il en était et ses songes de cinglé, il y avait de quoi avoir l’estomac dans les ...