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Rites, moeurs et aventures d'un monde lointain - II
Datte: 13/12/2025, Catégories: #recueil, #chronique, #merveilleux, #conte, conte, Auteur: Samir Erwan, Source: Revebebe
... s’y rendit. Micha fut prévenue, et ne put refuser le défi tendu. Varkossa était un creux de poussière et de feu, bâtie autour d’un gouffre ancien, où l’arène centrale a été taillée dans la gueule d’un volcan mort. On l’appelle « la Gueule de Varkossa. » Chaque combat y est vu d’en haut, par les gradins entassés dans les parois, et quand le sang coule sur la pierre noire, les gens disent qu’on entend le volcan remuer. Tout a commencé par un murmure. Une fille, grande, jeune, belle comme une lame, venue des cols, seule, avec dans les yeux la couleur de l’orage. Et dans sa bouche : un nom. — Je veux affronter Micha. Au début, les gens ont ri. Puis ils ont compris qu’elle ne plaisantait pas. Et qu’elle n’allait pas s’en aller. Le jour suivant, Micha entrait dans la ville. Comme si elle avait entendu l’appel dans les os. Elle n’a rien dit. Elle s’est inscrite à l’arène. Pas sous un faux nom. Pas cachée. Micha. Et alors… Varkossa a frissonné. Le bouche-à-oreille a fait le reste. Les soldats ont mis leur solde sur la mère. Les voleurs sur la fille. Les tavernes affichaient déjà des prix. Les artisans vendaient des statuettes des deux combattantes en cire noire. Et dans les ruelles, dans les bordels, dans les tours de guet, on ne parlait plus que de ça : — Elles vont s’entre-déchirer dans la Gueule. La fille de personne contre celle qui n’appartient à rien. La louve contre son reflet ! Le jour du combat, la Gueule était pleine. Des centaines. Peut-être plus. ...
... Suspendus à la roche. Les gradins pleins d’yeux. Et en bas : la poussière noire, le sable mêlé de vieux sang. Au centre, deux femmes. Micha. Nue, tatouée de suie, la peau mate couverte de cicatrices, les seins lourds, le ventre dur. Ses cheveux tressés en arrière, la fameuse queue de cheval nouée haut, noire comme l’ombre d’une nuit sans lune. Elle tenait une lame courte dans une main, un poignard recourbé dans l’autre. Nhalia. Sa fille. Plus jeune. Plus souple. Plus rapide. Son corps était une sculpture animée : hanches larges, taille fine, cuisses puissantes. Sa peau brillait, haletante, fauve. Ses crocs perçaient légèrement sous sa lèvre inférieure. Ses yeux étaient d’or. Sa queue de loup bat l’air, féline. Elle n’avait pas d’arme. Elle n’en avait pas besoin. Elle avait des griffes. Elles s’observèrent. Longtemps. Silence. La cloche sonna. La foule se tut. Un silence tendu, brûlant, presque sacré. Nhalia bondit la première. Elle glissa sur le sable noir comme une bête, les griffes en avant, le corps plié, le souffle court. Elle feinta à droite, puis frappa à gauche. Micha para. Un éclair d’acier bloqua la griffe. Une contre-attaque fendit l’air. Mais Nhalia roula, se releva d’un bond. Elles tournèrent l’une autour de l’autre, les jambes fléchies, les regards rivés. Puis Micha attaqua. Son poignard fendit l’air, visant l’épaule, puis le flanc. Elle enchaîna trois coups – précis, brutaux. Mais Nhalia dansa. Elle esquiva, glissa, se laissa tomber ...