1. Le long baiser de Brigitte


    Datte: 19/08/2019, Catégories: tendresse, jeunes, jardin, amiamour, Auteur: Zahi, Source: Revebebe

    ... fauteuil, jusqu’à parvenir à une certaine sérénité. Puis elle va s’essuyer le visage devant le grand miroir de la salle de bain. Voyant son double dans la glace, elle a voulu la gifler, cette nana aux yeux rouges de quarante-cinq ans, mais qui fait plus que cinquante, prématurément vieillie par les milliers de nuits sans sommeil et les incessants tourments de l’âme. Alors elle se rend compte qu’elle a oublié pour un moment que Brigitte s’est enfermée avec Zozou au fond du jardin. Après une petite hésitation, elle décide d’aller inspecter la situation.
    
    En descendant les marches des escaliers, elle pense à ce qu’elle pourrait voir si elle les découvrait dans une situation indécente. Ce serait abject qu’elle surprenne son propre fils en fornication, qu’elle découvre ses organes en érection. C’est impensable pour elle, même le matérialisme toujours vivace en elle ne lui permet pas cette inconduite. Il y a des limites à tout. Elle avance quand même avec pour seul objectif de s’assurer que son petit Zozou y trouve bien son compte et qu’il n’est pas maltraité.
    
    Elle arrive à la cabine et tend légèrement l’oreille contre la cloison en bois. Aucun bruit ne filtre, à part, de temps en temps, quelques soupirs de Brigitte, et ces espèces de gémissements particuliers et propres à Zozou, ces sons qu’il émet lorsqu’il est en émoi, ou lorsqu’il veut dire quelque chose et qu’il n’arrive pas à l’exprimer. Elle est en partie rassurée. Elle change de place, espérant pourvoir capter un peu ...
    ... plus de leurs ondes sonores. Elle change encore de place, marchant sur la pointe des pieds, faisant attention à ne pas se dévoiler. Enfin elle trouve un point plus favorable. Entre deux lamelles de bois, elle arrive à entendre assez clairement Brigitte.
    
    « On va faire notre premier baiser Zozou. Nous venons de sortir du collège et nous marchons ensemble jusqu’à la maison. Tu es plus âgé d’une année et tu te prends au sérieux, tu me racontes des histoires de ta classe, … »
    
    Ainsi, Annie a tout écouté. Prenant conscience de l’extrême tendresse de Brigitte, elle a même fondu en larmes une nouvelle fois. Elle a eu l’impression que c’était vrai. Elle a vu Brigitte et Zozou marcher ensemble le long du chemin qui sépare le collège de la maison ; c’était l’automne et il faisait froid, légèrement venteux. Le brouillard détruisait les alentours, ils étaient seuls. Elle a entendu les feuillages des sycomores craqueler sous leurs pas. Elle a entendu le chant des oiseaux, le froufroutement des branches, le ronronnement des moteurs alors que les voitures passaient. Elle les a entendu parler, et elle a vu Brigitte s’arrêter derrière un arbre, elle a même reconnu l’arbre, le chêne centenaire, le plus vieux et le plus beau du chemin, le quinzième après le feu de croisement, juste après le cimetière et le pont sur la A86 ; elle a tout suivi, elle a tout vécu. Elle a ressenti le bonheur de cet instant que toute mère souhaite à son propre fils, le moment où il la quitte à jamais, en trouvant ...