Bullet Proof - Histoires de Sexe

Bullet Proof

... Imbuvable ! Ha ha ha !
— Non non, ne t’inquiète pas, cette eau est potable, c’est ma bouteille, ne t’en fais pas, je n’ai presque pas bu dedans. Allons Charlotte, un petit effort.
— … Im… buvable ! ha ha ha ! … nez… ! hi hi hi !
— Mais pourquoi elle rigole bêtement comme ça, cette gamine ? Vous croyez qu’elle craque ? Elle fait une dépression nerveuse ?
— Je n’ai jamais vu cet effet-là chez des dépressifs, Alain, voyons, arrêtez de paniquer ! Regardez, elle revient doucement à elle… Charlotte, ça va mieux ?
— Ça doit être à cause de sa mère, j’ai peut-être été un peu dur avec elle…
— Pourquoi ?
— Elle a perdu sa mère l’année dernière. Je lui ai sûrement trop mis la pression…
— Mais… mais c’est impossible voyons, j’ai eu sa mère au téléphone il y a un mois ! C’est Charlotte qui vous a dit ça ?

Dans le silence qui suivit, je pris enfin conscience d’être à moitié vautrée dans le fauteuil, entourée de Maryse et de mon professeur. Le rire m’avait quittée, je me sentais affaiblie, désemparée… l’instant d’après, un jet d’eau me doucha des pieds à la tête. Je poussai un cri, et croisai le regard furibond du mastodonte.

— Un peu d’eau vous fera du bien, grinça-t-il froidement, c’est Maryse qui l’a dit.

Maryse le regardait avec des yeux ronds, bouche bée. Il balança la bouteille en plastique vide par terre, tourna les talons et sortit de mon périmètre. Haletante, trempée, je me mis à bafouiller :

— Qu’est-ce… qui s’est passé ?

*

Tic-tac. Pchhhhhh. Les bras ...

... croisés, avachie dans le clic-clac, je contemplais d’un œil morne mon aspirine se dissoudre dans mon verre.

— Mais ils n’ont rien dit d’autre ? s’inquiéta Jérémy, posé en face de moi sur une chaise.

L’heure était grave. Un Conseil de Haut Lieu venait de commencer.

— Non, maugréai-je.
— Elle t’a renvoyée chez toi, et c’est tout ? Tu n’es pas renvoyée de l’université ?
— Chais pas.

J’avais une envie folle d’appeler Pauline. Autrefois, j’aurais partagé avec elle ce moment horrible, et on aurait essayé ensemble de trouver une solution à ce merdier.

— Charlotte, arrête de faire la gueule, tu sais, j’y suis pour rien !
— Mais pourquoi tu m’as pas réveillée ? me lamentai-je une énième fois.
— Tu avais mis ton réveil !
— Mais t’as vu ce qu’on a picolé hier soir ?!
— Chu, si tu tiens pas l’alcool, faut pas boire autant…
— Alors pourquoi tu m’as fait boire ?
— Attends, tu te fous de moi là ? T’as fait que de chialer hier soir, fallait bien que tu te détendes ! Est-ce que je savais moi, que c’était un rendez-vous aussi important ? Tu m’as rien dit !
— Chavais pas non plus.
— Ben voilà ! Et moi, il faut que je sois voyant ! Puis arrête d’accuser les autres en permanence, c’est soûlant !
— Ouais. J’sais. C’est toujours ma faute, chais bien.
— Je n’ai pas dit ça ! Mais il faut bien reconnaître, ces derniers mois…

Je m’enfonçai dans ma bouderie, fixant toujours mon foutu cachet d’aspirine virevolter joyeusement dans mon verre. Jérémy avait raison, comme toujours. ...