Bullet Proof - Histoires de Sexe

Bullet Proof

... dans les supermarchés.
— Ah, donc il est laid ?
— Mais j’en sais rien, je m’en fous ! m’emportai-je. Tu veux te le taper ou quoi ? Pff…

Je m’énervais d’autant plus que j’avais oublié de poser mon fard à paupières avant de me mettre du mascara. Mascara qui faisait d’ailleurs de gros pâtés à l’œil gauche, et j’avais une tache noire sur la pommette droite. Dans un juron bien senti, j’essayai de réparer les dégâts. J’aperçus Jérémy qui se marrait dans son coin.

— Bon, si tu penses que ça va durer, préviens-moi, j’ai mon pote Alex qui veut qu’on aille faire de la gratte au bord de la Loire.
— Ouais, O.K., grommelai-je.

*

L’air un peu frais de ce pâle début de printemps me revigora, et c’est avec plaisir que je parcourus les rues animées.

L’université grouillait encore de monde quand j’arrivai, vingt minutes plus tard. Je saluai quelques connaissances et me dépêchai de prendre l’escalier jusqu’au deuxième. Là, les couloirs étaient déserts, j’avais l’habitude. C’était la section philo, on était très peu, c’était comme ça. Les talons de mes bottes résonnaient sur le carrelage. Je croisai mon professeur de philo des sciences, qui voulut prendre des nouvelles de moi.

— Désolée, haletai-je, Monsieur Buvabe m’attend et je suis déjà en retard.
— Oh, tu verras, il est adorable. Bonne continuation alors Charlotte !

« Adorable, adorable », me disais-je en arrivant devant l’accueil. « Imbuvable, oui ! ». Alain Buvabe ! Il portait bien son nom ce saligaud !

Je ...

... frappai et tournai aussitôt la poignée, qui refusa de s’ouvrir. Stupéfaite, je cherchai des yeux les horaires d’ouverture. Bon, Maryse était partie. Un fol espoir m’étreignit le cœur. Peut-être que le fou furieux serait parti aussi ?!

— Ah, vous voilà ! fit un homme derrière moi. Jamais à l’heure, hein ? Par ici.

Je me retournai, angoissée. Le géant était devant la bibliothèque de section, porte grande ouverte, lumière allumée à l’intérieur, bras croisés, à m’examiner de son regard de marbre.

— Je vois que vous vous êtes changée… Vous avez meilleure mine que ce matin, fit-il remarquer d’un air perfide. On va pouvoir finir cet entretien alors, n’est-ce pas Charlotte ?

La mort dans l’âme, j’opinai faiblement de la tête, et le suivis dans la bibliothèque. J’hésitai sur la place à prendre. Buvabe m’indiqua une chaise de l’autre côté de la table, et je m’assis, à moitié tremblante. À quelle sauce allait-il me manger ? Serai-je renvoyée ? Nous étions encore une fois face à face, mais je me sentais plus sûre de moi. Je ne pourrais pas faire pire que notre précédente rencontre.

Le directeur avait toujours mon dossier devant lui, et ma chemise contenant mon brouillon de thèse, vu que je l’avais oubliée ce matin. Et plein d’autres papiers, que je n’identifiai pas tout de suite.

Il plia son grand corps et s’assit à son tour, sans me regarder ; tourna ses papiers quelques secondes, nota un truc, puis enfin planta ses yeux dans les miens. Involontairement, je me mis à serrer ...