Fin d'une illusion
Datte: 02/03/2019,
Catégories:
sf,
Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe
... avant que j’arrive, ou bien était-il vide ? C’était mon unique chance, si je n’arrivais pas à la convaincre de poser l’arme ou la lui prendre. Situation aussi surréaliste que critique.
Pour l’instant, je devais à tout prix capter son attention. Tant qu’elle m’écoutait, elle ne presserait pas la détente…
— Eva, je sais qu’on n’est pas sur la même longueur d’onde. Mais si vraiment tu as raison, que tout ceci n’est qu’une expérience, alors pourquoi diable faut-il se suicider pour quitter le jeu ? On ne peut pas juste dire « pouce, ramenez-nous » ? Hein ?
— Arrête d’avancer ! Je te jure que je vais tirer !
— Tu ne m’as pas répondu. Qu’est-ce qui les empêche de tout arrêter là, maintenant ? À moins que Keller, Piotr et les autres ne soient réellement morts… tout comme le reste de l’humanité ! Et moi aussi bientôt, si tu continues de me braquer.
Une lueur de panique traversa son regard fiévreux. Je tendis la main, paume ouverte.
— Donne-moi cette arme, Eva. Il y a d’autres moyens de s’en sortir…
— Non ! S’ils arrêtent l’expérience, on crève ! Mélusine ne veut plus nous laisser partir !
Je fis un dernier pas vers elle, comptant sur l’effet de surprise pour lui arracher le pistolet. Vive comme l’éclair, elle plaqua le canon contre sa tempe.
— Noooon ! ! ! ! hurlai-je, en bondissant en avant.
La déflagration retentit comme un coup de canon dans la petite pièce. Nous roulâmes à terre, nos membres enchevêtrés. Le flingue brûlant heurta ma joue sans que je m’en ...
... rende compte, ou si peu. Tout ce que je voyais à présent, c’était l’énorme flaque de sang sur le béton et la lueur de conscience en train de s’éteindre dans les yeux d’Eva.
— Eva ! Parle-moi !
Brièvement, un sourire crispa ses traits. Dernière manifestation de vie, peut-être involontaire. Puis elle cessa de respirer…
--<( – XII – )>--
Cela fait maintenant deux semaines que son corps est enseveli près de celui de notre fils. Il y a une croix sur chaque tombe, un témoignage de notre lutte pour survivre en quelque sorte, même si personne ne doit plus jamais passer dans le coin. Un symbole dérisoire bien sûr, mais qui à mes yeux conserve toute son importance…
Depuis la mort d’Eva, les heures s’écoulent dans un brouillard informe. Une lassitude amorphe a fini par anesthésier l’horreur de cette perte, la douleur de l’absence. Le quotidien n’a plus aucune prise sur moi. Je ne me rase plus, je ne me lave plus, je ne prends même plus la peine de cuisiner ni de faire quoi que ce soit d’autre. Il règne un bordel indescriptible dans l’abri. J’ai laissé tomber la maintenance des gaines techniques, des filtres antiradiations. Même ça, je m’en fous. Sans elle je n’ai plus goût à rien, plus de motivation pour continuer.
Je reste prostré dans le salon à ne rien faire, à repenser à son geste. En réalité, Eva ne s’est pas suicidée. Non. Elle imaginait simplement clore une expérience douloureuse, un supplice n’ayant que trop duré. Est-ce que c’est ça, la définition de la vie ? Le ...