Un jour sans fin
Datte: 26/02/2019,
Catégories:
nopéné,
confession,
Auteur: Jane Does, Source: Revebebe
... ont des oreilles. Et des yeux aussi ! Tu as entendu ?
Elle a tourné la tête vers la porte. Si j’ai aussi perçu un bruit curieux, je ne sais pas vraiment de quoi il s’agit. Elle m’explique, les rondes, le jour, la nuit, les œilletons et tout ce qui nous entoure dans ce monde paumé. Elle me parle de baveux, d’avocats, de conseils et je suis perdue dans un univers où même le vocabulaire m’est étranger. Puis elle se veut sympa, m’offre une sorte de boisson chaude.
Elle nomme ça pompeusement « café », mais c’est juste une poudre noire infâme délayée dans de l’eau bouillante. Le sucre est obligatoire pour que ça passe. Et je sens ce fossé entre ce que je vis et ce que je vivais… avant d’entrer dans… cette cage. Le lit est à étage et comme elle occupe la couchette supérieure, je dois donc me contenter de celle du bas. Puis enfin, elle m’explique tous les trucs, les appels du matin, ceux du soir quand les matonnes changent de service. Et je m’enfonce dans une horreur absolue…
Le déjeuner… servi sur un plateau est distribué par une détenue et en fonction des petits dons que nous lui faisons, la quantité est plus ou moins… généreuse. Mais moi, je n’ai rien… rien de rien, vraiment rien à partager. Alors, les jours qui passent sont plus difficiles et les heures de semi-liberté se passent elles aussi dans une cour de promenade si petite, tellement étriquée. Et la promiscuité y est effrayante. Quelques jeunes femmes sont toujours sur mon dos, réclamant des cachets, parfois ...
... m’exhortant à en demander pour elles à l’infirmerie.
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J’ai vu le directeur. Un jeune type qui se roule ses clopes. Il a une sorte de sourire et s’exprime d’une voix qu’il veut chaleureuse. Comme si entre ces murs ça pouvait exister, la chaleur. Depuis combien de temps suis-je enfermée ? Je ne veux plus m’en souvenir. Le temps n’a pas la même valeur dans ces longues coursives qu’à l’extérieur. Les deux heures de promenade le matin et l’après-midi, je ne veux même plus en entendre parler. Le sport non plus puisque c’est tout un essaim de camées qui sont là à harceler les autres en général et moi en particulier.
Non ! Je suis mieux dans mon bouge. C’est un étrange manège qui se joue entre ces femmes. Un jeu du chat et de la souris. Je ne suis pas armée pour rivaliser avec ces pestes hargneuses qui sont là pour quelques mois seulement. Le prix à payer pour avoir traficoté dans une citée quelconque, pour avoir traîné avec je ne sais qui, et je m’en tape. Je n’attends rien de ce juge que je vais revoir bientôt. Encore moins de cette avocate qui n’est pas seulement venue me visiter depuis mon arrivée en prison. Mais elle n’a pas oublié de m’envoyer un courrier… réclamant une avance sur ses honoraires…
Et où irais-je pêcher l’argent qu’elle me demande ? Je n’ai rien d’autre que ce que l’administration veut bien me donner. Un peu de savon, de la lessive et puis voilà, la gamelle de chaque service, bonne ou mauvaise, il me faut m’en contenter. Je ne parle plus et ça, ...