1. Un jour sans fin


    Datte: 26/02/2019, Catégories: nopéné, confession, Auteur: Jane Does, Source: Revebebe

    Le silence, oppressant, me prend à la gorge. Cette absence de bruit qui me fait peur me glace le sang. Je crains les nuits avec leurs revenants qui me hantent. Puis il y a ces pas. Ceux d’autres fantômes qui tournent derrière la porte, dans le grand couloir. Je sursaute au moindre déplacement d’air. On ne s’habitue jamais tout à fait à ce genre de truc. Parfois la nuit est trouée par un cri, par la lumière aussi qui revient l’espace de quelques secondes pour accentuer encore le sentiment de frayeur.
    
    Les nuits ici, c’est le royaume de la crainte, de la peur panique. Tout est multiplié par dix, par vingt. Les esprits se relâchent et les images se mettent en action. Celles de ces actes qui, pour la plupart d’entre nous, nous ont amenées ici, dans cet égout du monde. Je me tortille sur le lit, survivante d’un univers sombre et froid. Chaque matin ramène la vie, mais pas celle toute rose des petits déjeuners aux bonnes odeurs de café. Non, celle plus terne d’un « bonjour » hurlé dans le seul but de nous voir bouger.
    
    Ici, dans ce bourbier imposé, une nuit n’est en fait composée que de segments… douze en vérité et pas tous d’égales longueurs. C’est tout le temps différent. Derrière la porte, les doigts qui appuient sur l’interrupteur ne sont jamais les mêmes et plus ou moins pressés, en fonction des visions qu’ont leur propriétaire. De l’intérieur de la piaule, impossible de juguler ce processus immuable qui se renouvelle chaque fois, de la nuit tombée à l’aurore d’un nouveau ...
    ... jour.
    
    Le soleil… il n’a guère droit de cité dans cette galère. S’il se lève bien à l’aube, il a aussi à faire un vrai parcours du combattant pour venir réchauffer mes vieux os. C’est aussi la punition ! Oui, le mot semble juste, mais si peu fort au regard de ce que c’est vraiment. Et c’est tout zébré, que les rayons du Dieu Ra m’arrivent, pour essayer d’embellir un quotidien fait uniquement de contraintes.
    
    Au mur de cet ersatz de chambre, un calendrier. Important celui-ci, à bien des titres. D’abord il me sert à cocher chaque nouveau matin. Ce qui est fait n’est plus à faire. Puis il me permet de continuer à espérer, à croire en une existence meilleure. Mais je suis certaine qu’elle ne pourra jamais être pire que cette antichambre de l’enfer. Se raccrocher à des détails, se dire que demain… demain sera moins triste… qu’il existera bien un autre paradis !
    
    Oui ! Dans trente-six mois, douze jours et quelques poussières d’heures, si tout va bien. Et alors que j’écris ces mots, une larme incapable de se dissimuler vient saloper mon cahier. Je l’essuie d’un geste rageur. Il pleut dehors, il pleut sur ma vie et il pleure sur ma page de carnet. Les bruits sont depuis quelques minutes plus insistants. Les clés dans les serrures grincent et les portes claquent l’une après l’autre. La mienne ne fait pas exception à la règle.
    
    — Bonjour ! Déjà debout ? Ça va ce matin, vous n’êtes pas malade ?
    — Bonjour !
    
    Pas d’autres réponses que le battant de chêne qui se referme sur le ...
«1234...12»