Rhapsody in blue - Deuxième partie - Histoires de Sexe

Rhapsody in blue - Deuxième partie

... la pizza n’arrive pas.

Mais ma tentative de détournement de sujet échoue piteusement, Arkshay ne comptant pas en rester-là. Avec fatalisme, je me dis qu’il ne lâchera pas ce palpitant sujet avant d’avoir eu la confirmation de ce qu’il croit avoir deviné.

– C’était un très bon ami, même s’il n’est resté que quelques mois en France, je réponds à une autre question.

– Ah, vous étiez amis… C’est bien d’être resté en contact, dit Arkshay.

– À vrai dire, nous ne nous sommes pas parlé pendant longtemps… j’étais amoureuse de lui, ajouté-je enfin.

GAGNÉ. Arkshay hoche la tête d’un air entendu. Et voilà, j’ai craché le morceau ! Je me sens si déprimée que je détourne la tête un moment.

– Pourquoi est-ce que c’est si long ? fais-je avec irritation.

Arkshay est bien d’accord avec moi, et se renseigne auprès du patron. Apparemment, notre commande s’est égarée entre le comptoir et la friteuse, éloignées toutes deux d’une vingtaine de centimètres. Nous repassons la commande, et même Arkshay a l’air de perdre son calme et sa politesse. Ça doit bien faire vingt minutes que nous sommes plantés là à attendre notre pizza.

Je te vois soudain te frayer un passage entre les tables, le regard braqué sur nous, interrogatif et assombri. Je me sens embarrassée, sans véritable raison, et m’arrange pour ne pas croiser ton regard, laissant le soin à Arkshay d’expliquer le pourquoi du comment. Tu repars avec un froncement de sourcils.

Notre pizza arrive enfin, accompagnée d’un ...

... pichet d’eau et de verres, et nous payons avec soulagement avant de te rejoindre au fond de la salle. Aussitôt, Arkshay et toi entamez une discussion à en faire pâlir une dispute entre deux ministres dans une tribune politique. Sauf que vous, vous êtes d’accords entre vous.

Je prends ma part de pizza et me mets à la dévorer consciencieusement, me désintéressant de votre débat. Je ressens même une légère sensation de déjà-vu… sauf qu’hier je n’étais pas en train de manger.

Je repense à la confidence que j’ai faite à Arkshay, aux simples mots que j’ai utilisés, et pourtant, qui pourraient laisser entrevoir un immense tunnel d’amour et de souffrance.« J’ai été amoureuse de lui »

Pourquoi ai-je ressenti le besoin de dire ça ? Et comment en rester-là, comment ne pas dire, ne pascrier la suite, de cette assertion aux banals contours d’une banale histoire d’amour ratée ? Comment ne pas évoquer les conséquences d’un tel acte causal, parsemés dans le temps comme des défauts sur une pellicule poussiéreuse et gâchant, au final, la photo des tout premiers instants, comme celle, gangrenée, des tout derniers, hélas ?

Déglutissant de travers, je te regarde, puis regarde Arkshay, et les larmes brûlent mes paupières. Larmes que je m’empresse de refouler en même temps que je fais descendre le bout de pizza à l’aide d’une généreuse rasade d’eau. Je baisse le nez sur mes restes de nourriture, noyés dans une graisse orange et indéterminée. Je n’ai plus très faim. J’ai envie de saisir le ...