1. La rencontre du sergent Valentina Netchaïev


    Datte: 15/02/2019, Catégories: guerre, fh, inconnu, uniforme, forêt, Oral nature, Auteur: Jean-Marc Manenti, Source: Revebebe

    Le sergent Valentina Netchaïev marchait paisiblement dans cette immense forêt de Biélorussie, les sens délicieusement enivrés par les senteurs de la végétation luxuriante. Aux aguets, elle n’entendait que les piaillements des oiseaux, le chuintement de la brise dans les hautes frondaisons, interrompu de temps à autre par le martellement lointain des tirs sporadiques de mitrailleuses lourdes. Les combats faisaient rage du côté de Minsk, Brest-Litovsk et Vitebsk.
    
    Encore une centaine de mètres et elle allait pouvoir faire une pause au bord de la petite rivière dont elle ne connaissait même pas le nom, puisque Valentina venait du fin fond de la Sibérie. Comme beaucoup de femmes russes, elle s’était enrôlée dans l’Armée Rouge pour sauver sa petite Mère Russie. Son régiment féminin de mortiers avait été en grande partie décimé à Stalingrad. Depuis, elle faisait l’agent de liaison entre le régiment de chars où elle avait été versée et les groupes de partisans de la région. Voilà plusieurs heures qu’elle marchait, chargée de vingt kilos de médicaments. Elle avait soif et le glougloutement de la rivière toute proche attisait son envie d’eau fraîche.
    
    Brusquement, elle se figea, son petit nez en l’air. Les lignes allemandes étaient à un kilomètre à peine de là, et pourtant des effluves de cigarette flottaient, toutes proches, dans l’air chaud. Pas de doute, elle connaissait bien cette odeur : c’était du tabac allemand. Un frisson glissa le long de sa colonne vertébrale. La ...
    ... jeune femme posa lentement son sac de toile à terre, vérifia que ses grenades à manche étaient bien accrochées à son ceinturon.
    
    Elle saisit son couteau et, à pas de loup, se laissa guider par le parfum âcre de la cigarette, en regrettant de ne pas avoir pris son Tokarev. L’effet de surprise allait jouer en sa faveur, mais elle aurait préféré son revolver plutôt que son long couteau. Au moment où elle aperçut le jeune officier, assis sur une souche, celui-ci écrasait consciencieusement son mégot sous le talon de sa botte, et se replongeait dans sa lecture. Son fusil mitrailleur était posé contre un arbre, il n’aurait ni le temps de s’en saisir, ni le temps de prendre son pistolet dans son étui.
    
    Elle remarqua un insigne sur son uniforme. Il venait d’une unité médicale ! Lorsqu’elle affermit sa prise sur le manche de son coutelas, un sourire cruel illumina son visage aux larges pommettes asiatiques.Peu habitué au combat… ça allait être du gâteau !
    
    Un craquement de branchages et un choc sourd firent sursauter l’officier allemand. Des fourrés, juste devant lui, une silhouette en uniforme de l’Armée Rouge jaillit comme un diable de sa boîte. Otto Piltz se figea, les mains crispées sur son livre ouvert. Son regard croisa brièvement celui, flamboyant de haine, de Valentina Netchaïev.
    
    De petite taille, elle était chaussée de bottes montant à mi-mollet, vêtue d’un pantalon et d’une chemise militaire de toile grossière, cette dernière étant ouverte sur une poitrine que l’on ...
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