Du temps perdu (1)
Datte: 15/11/2018,
Catégories:
Gay
Auteur: Arouse, Source: Xstory
... place, je pourrais vraiment tout perde. Tu ne connais pas ma famille. Sans parler de ma carrière. Et... Je ne ressens rien pour les hommes. Vraiment.
— C’est pas l’impression que j’ai.
— C’est juste avec toi. Je ne peux pas, tu comprends.
Je hochais la tête.
— Je comprends. Tu as peut-être raison, tout ça n’est bon ni pour toi ni pour moi.
Nous échangeâmes un dernier regard et je fermais la porte. J’étais un peu mélancolique, mais étrangement soulagé. Tout en quittant le bâtiment, je ne pus m’empêcher de songer que c’était la meilleure baise que j’avais eue depuis longtemps.
Près d’une quinzaine d’années s’écoulèrent. Je n’eus plus de ses nouvelles, et je ne cherchais pas à en avoir. Je connus des conquêtes, des amants, des amoureux, pour le pire et le meilleur. Je repensais parfois un peu à Thomas, les images de nos ébats me revenaient de temps à autre en flash. J’appris par personnes interposées qu’il s’était marié. Grand bien lui fasse. Je n’étais pas le plus lésé dans cette histoire. Cependant, à l’aube de mes quarante ans, une amie m’annonça ses fiançailles. Il se trouvait qu’elle était la rare connaissance que j’avais en commun avec Thomas. Fruit du hasard ou réelle volonté, nous avions toujours réussi à nous éviter jusqu’alors. Et je pense même qu’elle ignorait que je connaissais Thomas. Sans parler du reste. Je caressais l’idée de lui envoyer un mail, ou quelque chose du genre. Il me paraissait vraiment trop stupide que nous nous croisions à ...
... nouveau ainsi. Sans avoir eu la chance de parler.
Mais je ne franchis jamais le pas, voyant la date de la cérémonie arriver à grands pas. Le jour du mariage arriva finalement sans que je ne le contacte. Et si tout le monde n’avait d’yeux que pour les mariés, les miens étaient rivés sur Thomas. Le temps avait fait son œuvre, sa perte de cheveux précoce s’était muée en calvitie, il arborait une très légère bedaine et son visage s’était orné de quelques rides. Mais honnêtement, il ne m’avait jamais paru aussi attirant qu’aujourd’hui. J’ignorais si c’était le fait de le voir si masculin dans son costume sombre aux tons bleus, ou son côté « père de famille » qui m’enivrait. J’étais cependant étrangement serein. De l’eau avait coulé sous les ponts et je savais à présent que les appâts de l’envie étaient bien souvent des pièges retors. Et aussi désireux de lui que je pouvais l’être, j’acceptais qu’il fût un fantasme, et que retomber dans nos anciens ébats ne nous apporterait que du tourment.
C’est donc tout à fait détendu que je pus l’aborder et même converser avec sa femme, charmante, mais dont je ne retins pas le prénom. Le reste de la cérémonie se déroula sans anicroche, je passais un excellent moment. La fête battait son plein, et la nuit était avancée, quand je regagnais ma chambre pour y chercher une aspirine, le rosé me tapant sur le crâne. On toqua et Thomas passa la tête par la porte :
— On m’a dit que tu allais chercher une aspirine. Tu aurais une pour moi ?
— Oui, ...