Mon patron, cet abruti (6 / 7)
Datte: 25/09/2018,
Catégories:
photofilm,
nonéro,
policier,
Auteur: Anne Grossbahn, Source: Revebebe
... bon coup et, au bruit et à la localisation de sa voix, j’imagine qu’il est tombé en arrière, les pieds pris dans son pantalon déboutonné.
— Qui a éteint, bordel ? hurle-t-il.
— Les plombs ont pété ! crie un autre.
Le vacarme est incroyable : j’entends des cris, des bousculades, des objets qui tombent, tandis que, dans le noir, je fonce en direction de la porte. Mes bras tendus atteignent le mur, je tâtonne en vitesse et trouve le panneau au moment où quelqu’un me touche le dos. Je hurle, balance un coup de talon et tente d’attraper la poignée. Il ne me semble pas avoir vu ces idiots prendre la précaution de fermer à clé, alors j’actionne la clenche. Quelqu’un m’attrape par derrière et me ceinture juste au moment où j’ouvre la porte, puis je sens qu’on essaie de m’immobiliser.
Une petite flamme tremblote lorsqu’une main allume un briquet et, tandis que je me débats vainement dans les bras de quelqu’un qui doit être Devreux, j’entends le type en salopette annoncer qu’il va réarmer les disjoncteurs. Une seconde flamme tremblote à son tour, et je vois faiblement le visage de Darville.
— Je tiens la blonde, dit la voix du concierge, près de mon oreille.
— Et l’autre ? demande Darville, nerveux.
— Sais pas, répond Devreux. Elle n’a pas pu sortir, à mon avis.
— Elle se planque quelque part. On va attendre que Fred rallume.
Il se déplace et s’approche de nous au moment où la seconde flamme disparaît. Je distingue vaguement qu’il referme la forte et entends claquer ...
... le battant. Les secondes s’égrènent, dans un silence troublé seulement par nos respirations, et je sens tout à coup une des mains de Devreux qui se déplace. Il veut me peloter ou quoi ? Je recommence à me débattre, histoire qu’il s’occupe davantage à me tenir qu’à autre chose.
— Bouge pas, toi ! grogne-t-il.
Mais à ce moment-là, la flamme du briquet s’éteint et j’entends Darville grommeler :
— Putain ! C’est chaud, ce truc !
Alors que je suis occupée à lui souhaiter mentalement d’attraper de belles ampoules aux doigts, la lumière revient, nous faisant cligner des yeux. Le temps que nos rétines s’accoutument aux nouvelles conditions d’éclairage, et nous jaugeons la situation : Darville, torse nu et braguette ouverte, est adossé à la porte, tandis qu’à un mètre de lui à peine, Devreux me ceinture fermement. Les trépieds ont été renversés, ainsi qu’une des chaises, et les deux caméscopes sont par terre, dans un triste état en ce qui concerne celui encore fixé sur son support en aluminium. Cheryl n’est visible nulle part.
— Où elle se planque ? maugrée Darville en se décollant de la porte.
— Bouge pas, toi ! me répète Devreux.
Lentement, mon patron se déplace, dans l’intention évidente de débusquer Cheryl, qui doit se dissimuler quelque part.
— T’es sûr qu’elle est pas sortie ?
— Je ne crois pas, affirme le concierge.
Je ne le crois pas non plus, parce que quand je suis parvenue près de la porte, elle était encore fermée, et si ma collègue avait filé par ...