1. La forêt


    Datte: 08/09/2018, Catégories: nonéro, aventure, fantastiqu, Auteur: Gaed, Source: Revebebe

    ... entrouverts, ma main sur son cou, je touche quelque chose de froid, de froid et de tiède en même temps et puis plus rien, les images disparaissent.
    
    Ne reste plus qu’une voix, une voix sans âge, une voix de femme.
    
    La voix de la vieille femme et le goût âcre de son baiser.
    
    Descends le fleuve, descends le fleuve
    
    La vérité monte ainsi, lentement dans mes entrailles jusqu’à faire de mon esprit son esclave : je suis mort.
    
    Non, non, c’est impossible.
    
    Je ne veux pas, c’est trop tôt, bien trop tôt. Ma main griffe ma poitrine d’un mouvement sec et régulier.
    
    Non, je ne veux pas.
    
    Je ne veux pas.
    
    Cela ne peut être ainsi.
    
    Cela ne peut être ainsi Lazarre, cela ne peut être ainsi lorsque le trépas vous emporte.
    
    Où est la réponse ?
    
    La clé de la grande énigme ? Où est l’antre de la lumière où les âmes sont libres, délestées du poids de la grande question, de cette question qui nous brûle depuis le jour de notre naissance ? Où est la berge que nous promet le livre sacré ?
    
    C’est moi, c’est moi qui divague. Mes blessures, la fatigue. Mon esprit est tourmenté. Je m’agenouille et murmure en sanglotant.
    
    Excuse-moi mon Dieu, pardonne mon doute, je ne puis douter de Toi, j’ai fui le combat, je T’ai tourné le dos, cet endroit est maudit, il m’éloigne de Toi, Pardonne mon doute, Pardonne-moi.
    
    Pardonner…
    
    Mais pardonner quoi ?
    
    La vérité est plus forte que la foi, je la sens à nouveau s’insinuer en moi, détruire mes certitudes avec application. Trop de ...
    ... choses inexplicables, de faits négligés. C’est cela parfois la vérité, une simple suite de questions. Je fouille mes poches, de la poussière, de la saleté et puis la pierre. Je la sors, l’observe sous le soleil. Elle brille de son éclat vert, splendide. Le chat me l’a donnée. Mais qu’évoque-t-elle, qu’est-elle censée me dire ?
    
    La nuit va venir, la nuit et son cortège de bruissements, de souffles, de cris d’animaux. Tout ici a l’illusion de la vie, la vie comme on pourrait la rêver, comme j’aurais pu la rêver, loin de la guerre, loin du vacarme assourdissant des armes.
    
    Plus intriguant encore, je me rends compte que je n’ai jamais vraiment eu faim. Non, c’était plutôt un réflexe, comme s’il fallait que j’aie faim. Même mon sommeil est étrange, il ne me repose pas. Je me demande si j’en ai besoin.
    
    Et ce fleuve qui n’en finit pas de s’ébrouer sans heurt et qui semble me guider vers un ailleurs lointain, plus lumineux encore. Ces êtres que j’ai croisés, allaient vers d’aussi diverses que contradictoires directions. Tous marchaient le soleil dans les yeux, cet étrange soleil qui n’en finit pas de se lever dans un ciel toujours bleu, puis de se coucher dans une nuit calme et étoilée, toujours la même. Il ne fait ni chaud, ni froid, tout n’est qu’équilibre. Ces hommes et moi allons tous au même endroit, un endroit que je ne veux pas connaître.
    
    Peut-être même n’y a-t-il pas d’endroit, peut-être pourrais-je marcher ainsi des années durant.
    
    Au loin, il me semble discerner le ...
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