La forêt
Datte: 08/09/2018,
Catégories:
nonéro,
aventure,
fantastiqu,
Auteur: Gaed, Source: Revebebe
... me suis retrouvé seul, seul au milieu de tous ces soldats. Des nuages ont masqué le soleil, j’y ai soudain vu clair et la folie du combat m’est apparue pleinement.
J’ai frappé, frappé encore et encore. Combien de temps ? Des larmes coulaient sur mon visage, mon souffle me brûlait, mais je frappais toujours plus fort, toujours plus vite. Les tailleurs de gemmes lançaient des incantations derrière nous, leurs voix se fondant à nos hurlements. Ils étaient pourtant bien loin du combat, là-haut sur les collines et pourtant, par Lazarre, j’entendais leur voix.
Un destrier m’a chargé, je l’ai évité et puis le sang a coulé sur mon ventre, la douleur m’a frappé, là, juste au-dessus du cœur et je suis tombé, le carreau d’arbalète planté dans ma chair. Je me suis traîné. Des hommes s’écroulaient autour de moi, sur moi. La fumée des flèches enflammées, imbibées d’alcool de tull, qui s’abattaient de toute part me brûlaient les yeux. Je rampais sur des cadavres, mes mains s’accrochant parfois à des pans de chair ouverte. Déjà la puanteur de la mort se répandait, déjà son parfum délétère recouvrait la vallée comme un linceul invisible.
Et ensuite ?
Voilà la forêt.
Je reprends le chemin de fortune que j’ai taillé à la force de l’épée, à l’aller. Mon cœur s’emballe, je fais mine de revenir sur mes pas, mais l’instinct – toujours lui – me remet sur le sentier.
Derrière moi la chaleur, j’entre dans la nuit.
Maintenant il n’y a plus de lune, les épais branchages des ...
... Colymbres voilent le ciel, brisant tout espoir de lumière. J’ignore depuis combien de temps je marche dans la forêt sans nom, longtemps sûrement.
Suivre ces racines épaisses, remonter les veines jusqu’à son cœur. Comme toute chose, elle en possède un.
Les tintements de cloches se font très présents, je ne suis plus loin.
À l’endroit où j’ai vu le chat, il y a mon cheval mort, le cou retourné. J’aperçois sur le sol d’autres traces de sabots et d’autres marques de pas. Il y a eu du passage, il y a peu, les traces sont encore profondes. Peut-être les deux hommes qui étaient avec moi ? Peut-être d’autres voyageurs.
Bientôt, la maison se dessine sous un trou d’arbres.
La porte.
Ouverte.
Les cloches tintent et tintent encore et encore, plus proches que jamais tandis que je m’engouffre dans la demeure. Un effroi incontrôlable me saisit, je ne peux aller plus loin, je ne veux pas voir, je ne veux pas voir ça.
— Le troupeau, souffle la vieille voix.
L’étrange sifflement.
Elle est là qui m’observe, au bout du corridor, pâle silhouette dans l’obscurité, la vieille femme du rêve.
Dehors, j’entends des bruits de pas traînants, des fourrés qui bruissent et les cloches qui d’un coup se taisent. Je me sens pris de vertiges, j’ai envie de vomir. Elle s’approche de moi et me dépasse sans même me regarder. Dos famélique, démarche tremblante. Et sa voix s’élève, tantôt douce, tantôt dure, un souffle gelé, blanc s’en dégage, il sort de sa bouche.
Elle se retourne ...