La chevrette - Histoires de Sexe

La chevrette

... un confortable matelas qui m’emmènera aisément jusqu’à la retraite. Je n’ai plus d’attaches, sinon deux filles vivant loin de moi et qui ne soupçonnent même pas l’existence de leur demi-frère, rien ne s’oppose à ce projet. Et puis occuper ce chalet isolé de la cohue par d’anciens pâturages empêchera la convoitise d’agents immobiliers peu scrupuleux.

Un mercredi de septembre, quand les feuillus deviennent jaunes et roux entre les conifères irrémédiablement verts, on sonne à ma porte. Les visites sont rares. Une petite dame en tailleur strict, serviette à la main, que j’aurais prise pour un témoin de Jéhovah, se présente.

— C’est vous Monsieur Jérôme Rézin, l’auteur de « Au cœur de la Vanoise » ?
— Oui, c’est bien cela.
— Je suis Madame Bachot, la nouvelle directrice de l’école.
— Entrez, je vous en prie.

C’est une petite femme pleine de vigueur et très souriante qui s’installe sur mon canapé. Sa silhouette courte et vigoureuse ainsi que son joli minois ne sont pas sans me rappeler quelqu’un, de loin. Je lui offre un café, elle tire de temps en temps sur sa jupe qu’un fessier rebondi s’obstine à remonter, malgré des cuisses puissantes, ce que confirment ses mollets musclés.

— Je viens enfin d’être nommée ici, j’attendais ce poste depuis tant d’années, mais le titulaire y est resté jusqu’à la retraite. J’adore cet endroit, découvert par hasard il y a une vingtaine d’années lors d’une randonnée.
— Vous deviez être bien jeune…
— C’est vrai, j’avais vingt-trois ...

... ans, mais je n’ai eu de cesse que de venir m’y installer.
— Hélas, ça a bien changé…
— Oui, mais, pourquoi hélas ? C’est normal et c’est bien que cette vallée se développe. Et puis ça reste assez familial et confidentiel par rapport à d’autres endroits.
— Je le concède, sans cela je ne me serais certainement pas installé ici.
— On m’a dit, donc, que l’auteur de mon ouvrage préféré habitait ici, dit-elle en sortant un exemplaire usagé de mon bouquin. C’est pourquoi j’ai osé vous déranger. Oh merci ! Qu’est-ce que ce livre m’a fait rêver et a alimenté mes cours. On n’a rien fait de mieux depuis…
— On me l’a déjà dit, même si je n’en suis pas bien certain. Vous voulez un autographe, c’est ça ?
— Non. Oui, accessoirement… Ce que je voudrais, c’est que vous veniez expliquer aux enfants comment on fait un ouvrage comme celui-là. Et puis… si vous le voulez bien et si ce n’est pas trahir trop de lieux secrets, me guider dans les endroits où vous avez fait ces formidables clichés. Je voudrais ressentir physiquement ce que vous avez ressenti.

Elle s’enflamme en parlant, penchée en avant, la poitrine petite, mais arrogante, désormais sans souci de la jupe qui remonte jusqu’à mi-cuisse. Vraiment, ses attitudes et sa corpulence me font penser à Margot. Signe du destin ?

— Je vais vous raconter toute l’histoire de cet ouvrage…

Plus personne ne peut être gêné, maintenant, de cette merveilleuse vérité. Je l’emmène même dans mon « perchoir », le bureau que j’ai installé sous les ...