1. Adrian


    Datte: 13/08/2018, Catégories: nonéro, portrait, journal, Auteur: HugoH, Source: Revebebe

    ... comme si l’eau se mettait à brûler. Tout le groupe était là. Hugh Jones qui n’avait rien de prévu était aussi de la partie. Roue libre. Quant au boss, il n’aurait raté pour rien au monde un beau voyage comme celui-là. Fatigué comme jamais, mais heureux. Un mal étrange le tenait. Traitement corticoïdes, il avait gonflé de dix kilos. Son crâne lisse rougissait de chaleur. Ressemblait de plus en plus au Caïd deMarvel comics. Graham l’appelait Wilson Fisk, ce qui avait le don de l’irriter au plus haut point puisqu’il ne connaissait rien à ces « débilités de trucs dessinés ». Peu de temps avant, Adrian avait donné une interview assez longue au NME qui décidément les soutenait avec énergie. Un bon journal, vraiment. Il avait été sincère, il essayait toujours de l’être.
    
    L’après-midi, avant la balance, ils allaient à la plage quand il y en avait une pas loin. Adrian se disait en observant le groupe chahuter sur le sable, mais qu’est-ce qu’ils sont blancs, tous ! Puis il passait une main sur son torse comme pour s’assurer qu’il était bien là. Lui aussi était pâle, maladivement pâle. Le groupe jouait au ballon, crème solaire sur le nez, bob sur le crâne. Manquait plus qu’une pancarte au-dessus de leur tête précisant bien qu’ils étaient Anglais. Les gens en Italie étaient souriants, du moins c’est ainsi qu’Adrian les percevait. Beaux et élégants aussi. Il y avait plus de jolies filles sur une petite plage du sud que dans tout le West End.
    
    Le soir, après le concert, ils allaient ...
    ... vider des bouteilles de chianti en regardant les matchs de la coupe du monde, devisant bruyamment sur la médiocrité de l’équipe nationale, buvant leur dépit jusqu’au matin. Kevin Keegan les avait déçus mais bon, tout le monde était fan de Keegan, même s’il jouait chez ces connards de Southampton.
    
    Durant tout le mois que dura la tournée, Adrian réduisit un peu les doses d’alcool, de calmants et d’héroïne. Juste un peu ; de quoi dire que le soleil avait un petit effet, que la dolce vita n’était pas une légende. Et pour le coup, même en 1982, ça n’était pas une légende, simplement, c’était encore mieux avec toute cette merde dans le ventre et dans le sang.
    
    *
    
    Ils jouaient dans des petites salles de petites villes. Mais chaque soir, c’était rempli. Pas de quoi faire rougir un banquier, mais au moins, cela donnait-il du sens à ce voyage. Les gens étaient réceptifs. Hugh et le boss lui lâchaient la grappe. Alors, ils jouaient vite. Et Michael, par quelques sourires consentis lors de fins de set, là derrière ses fûts, lui montrait bien que lui aussi appréciait. Et si Michael aimait ça, Graham aussi.
    
    En Italie, il aima être le leader de ce groupe, s’en sentit fier, goûta chaque fois qu’il annonçait en début de concert :
    
    — Nous sommes The Sound, et nous sommes anglais.
    
    Alors, il bombait le torse et les premières notes deWinning venaient s’écraser sur la petite foule.
    
    Qu’aurait-il pu souhaiter de plus ? Ils étaient peu mais ils étaient là. Combien d’êtres sur cette ...
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