1. Adrian


    Datte: 13/08/2018, Catégories: nonéro, portrait, journal, Auteur: HugoH, Source: Revebebe

    ... Horn qui produit ce truc non, Hugh ?
    
    Hugh Jones opina, Hugh Jones s’enfila une double pinte.
    
    — C’est fort, reprit le boss, très fort, sucré et moderne.
    — Fallait investir dans une boulangerie, Boss, ricana Graham.
    — C’que t’es marrant, Graham, c’est à mourir, vraiment. Je devrais surtout miser sur un groupe qui sait faire des putains de singles. Ce genre de trucs qui vous échappent. Des vrais singles, pur jus. Ça, ça m’excite vraiment.
    — On ne fait pas des singles, on fait des albums, objecta Michael.
    — On fait pas des singles, on fait des albums, singea le boss en prenant une voix aiguë et en affectant une moue plaintive. Tas de pisseuses. Je me branle de vos A L B U M S comme de ma première chemise. Parce qu’avant de parler d’A L B U M S, il va bien falloir me torcher un simple.
    — Ça seraContact the fact, coupa Max, on est d’accord là-dessus.
    — Vous êtes peut-être d’accord tous autant que vous êtes. Mais moi je suis surtout foutrement d’accord pour dire que ça vendra pas plus de dix exemplaires. Et encore, parce que vos cons de parents auront décidé de faire une bonne action. Expliquez-moi comment, avec tout le talent que vous avez, il vous est impossible de me pondre un single digne de ce nom. Deux albums et rien, même pas l’ébauche d’une évidente mélodie qu’on pourrait refourguer à la BBC.
    — C’est pas ce que disent les critiques.
    — Les critiques n’achètent pas vos disques, Max. C’est déjà beau que ces fils de pute nous donnent un peu d’écho. Sans mauvais ...
    ... jeu de mots, je sais que le sujet est sensible.
    
    Et il glissa un regard torve vers Adrian, absorbé par les rafales de couleurs qui giclaient du poste de télévision.
    
    Adrian avait la bouche entrouverte, Adrian plissait les yeux. C’était pas si mal effectivement ce truc. ABC. Il les avait toujours trouvés ridicules, mais maintenant qu’il les écoutait avec attention, le corps totalement engourdi et la cervelle saturée de chimie, il se disait que ça avait du sens, qu’il y avait bien de la mélodie là-dedans. Il devrait s’ouvrir un peu plus, s’ouvrir à d’autres influences, s’ouvrir aux autres. Tous ces foutus codes, toutes ces foutues postures.
    
    — Votre album, je vais le sortir comme ça. Il est bon, c’est sûr, ça ne vendra pas, c’est sûr aussi. Mais à quoi bon vous renvoyer encore en studio ? Ça me coûte des milliers de livres. C’est idiot, non ? Faites ce que vous savez faire. On verra bien où ça nous mène. Il va falloir tourner, tourner encore. L’Europe, le continent. Ouais, le continent. Je crois que la presse vous aime bien en Italie. On va tourner, les gars, et on va essayer de le fourguer votre putain d’A L B U M.
    
    Le boss souffla une tempête de fumée ocre en se calant dans son siège.
    
    — Ouais, reprit-il, on y va. Tous ensemble.
    
    Et il leva sa pinte vers le ciel.
    
    Ce furent des jours bénis. Routes sinueuses, villages à flanc de montagne, vignes luisantes de vie. Le soleil écrasait la Méditerranée. Lisse et brillante. Quand les rayons frappaient de biais, c’était ...
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