Adrian
Datte: 13/08/2018,
Catégories:
nonéro,
portrait,
journal,
Auteur: HugoH, Source: Revebebe
... percer. Quant au second, il avait épousé une Américaine et vivait désormais à la Nouvelle-Orléans où il était employé par une chaîne de télévision locale. Il ne leur en tenait plus rigueur, le temps avait fait son œuvre. Il était somme toute logique qu’à un moment ils se séparent, enfin, qu’ils le quittent. C’était déjà beau que cette affaire ait duré autant de temps, sans succès, sans une once de succès.
Michael lui avait dit que Graham et lui recevaient encore de temps à autre des demandes d’interviews, rares certes, venant d’obscurs magazines certes, mais ils y répondaient de bonne grâce. L’itinéraire de The Sound en fascinait plus d’un. Comment un groupe aussi talentueux avait-il pu passer à côté de la reconnaissance toutes ces années ? Pas de réponse. Personne n’en avait. Et puis, disait Graham, les années 80 vont revenir à la mode, c’est dans l’ordre naturel des choses.
Adrian repensait souvent au boss de Korova, et à quel point il aurait aimé qu’ils réussissent. Il l’avait mal jugé finalement, et peut-être que sans son foutu coup de sang qui avait accouché d’All fall down des années plus tôt, les choses auraient pu évoluer autrement. Mais il était Adrian Borland, et, détaillant toute la palette complexe qui composait sa personnalité, une particularité se dégageait, émergeait des ténèbres : l’orgueil. L’orgueil même malade, même perdant. L’orgueil encore et toujours, et il en fallait pour supporter tout ça. « J’emmerde le système », répétait-il devant sa ...
... fenêtre, et pour le coup, le système l’avait bien emmerdé aussi.
*
Il se fit bâtir un site. Virtuel, magnifique. Internet le rendait dingue, c’était vraiment la grande dinguerie. Ce coup-ci, tout le monde allait l’avoir son quart d’heure de gloire. Les choses changeaient. Révolution numérique, révolution des réseaux. Excitant, certainement.
Le 18 mars 1999, alors qu’il était prêt à entrer en studio pour enregistrer son sixième album solo dont le titre s’était imposé à lui depuis plusieurs nuits déjà,Harmony and destruction, Adrian envoya un message via son site à ses fans.
C’était le soir, il se sentait bien, confiant. Sa mère lui apporta du lait et des biscuits en lui caressant les cheveux et en déposant un léger baiser sur son front. Il n’avait pas eu de crises importantes cette dernière année, et forcément, un léger, très léger poids semblait avoir délesté les épaules de ses parents.
« Les choses vont aller mieux, Adrian, tu vas voir, tu dois y croire », lui murmurait sa mère chaque soir en fermant la porte de sa chambre, le plongeant dans une obscurité douce, et il se laissait imprégner de la musique de la maison, des fêlures du parquet, du grincement de la tuyauterie, des gouttes d’eau sur l’émail, des machines à laver en mouvement. Comme avant en somme. Mais ça ne serait jamais vraiment pareil.
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Le 26 avril 1999, alors qu’Harmony and destruction était quasiment bouclé et provoquait un enthousiasme non feint de la part de son label, Adrian se jeta sous un ...