Adrian
Datte: 13/08/2018,
Catégories:
nonéro,
portrait,
journal,
Auteur: HugoH, Source: Revebebe
... le déclara Max à ses amis un peu plus tard devant une bière, c’était sacrément pourri.
*
PIAS décida de démarrer la tournée de The Sound à Vitoria-Gasteiz, Espagne, Europe. L’automne dans sa grande désolation. Novembre même dans le sud du vieux continent restait novembre, et si ce n’était la teinte quelque peu apaisée du ciel, Adrian n’aurait pas eu l’impression d’avoir quitté l’Angleterre. Était-ce un bon endroit pour démarrer une tournée ? Était-ce le lieu idéal pour faire entendre au monde queThunder Up, dernier album des Sound, était désormais disponible chez tous les bons disquaires ? Tous les doutes étaient permis. Mais bon, il fallait bien commencer quelque part, et somme toute, c’était toujours mieux que la Roumanie.
L’ambiance dans le groupe était tendue. Graham et Michael d’un côté, lui et Max de l’autre. Tout ça n’augurait rien de bon. Il savait ce qu’on lui reprochait, cette instabilité maladive, son manque de leadership. Était-ce sa faute ? Comment aurait-il pu leur expliquer ce qu’il ne parvenait pas à comprendre lui-même ? Et quoi d’autre ? Les drogues n’arrangeaient rien ? L’alcool non plus ? Qu’en savaient-ils ? Ils étaient médecins ? Sans ces produits, il n’aurait pas été si productif, toute cette merde faisait assurément partie de son processus de création. Un connard du NME avait dit qu’ils étaient lesJosephine Baker du rock. Jamais là où on les attend, ne s’encombrant pas de textes emphatiques, et n’ayant aucun égard pour le business. Et surtout, ...
... étant appréciés partout ailleurs que chez eux.
C’était censé lui faire plaisir ? Vraiment ? C’était censé être élogieux ? « Question de point de vue », avait dit Max en ricanant bêtement.
*
Ils marchaient dans les ruelles. Le Pays Basque avait certainement un attrait mais ils ne le percevaient pas, ici à Vitoria. N’aimaient pas cette ville / Ne s’y sentaient pas à l’aise. Ils marchaient dans les ruelles, tous les quatre réunis comme au début, solidaires dans la bruine. En ligne. Mais silencieux.
La salle où ils allaient jouer était plutôt grande, bien agencée. Ce n’est qu’en sortant qu’Adrian avisa l’enseigne et le nom.The End. Ça clignotait faiblement dans le soir tombant. Il resta interdit un long moment, sa tête allait de haut en bas très très lentement. Max posa sa main sur son épaule.
— Ça va aller, Adrian.
Mais ça n’alla pas mieux. Michael et Graham le prirent par la taille. On rentra discrètement à l’hôtel. Adrian passa la nuit à délirer sur son lit, le front luisant de sueur. Max et Graham le veillaient ; Michael, lui, passait la tête de temps à autre, venant aux nouvelles et disparaissant presque aussitôt.
Dehors, la pluie battait le pavé.
*
Les patrons de PIAS ordonnèrent le retour du groupe et payèrent le rapatriement médicalisé d’Adrian. Tandis que l’avion décollait, Max observait sa main droite qui n’avait cessé de trembler depuis plus d’une semaine. Une tache sombre et irrégulière, formant comme un petit tas ramassé, était apparue sur ...