1. Adrian


    Datte: 13/08/2018, Catégories: nonéro, portrait, journal, Auteur: HugoH, Source: Revebebe

    ... rues bruxelloises. Loin de son pays, Adrian se sentait plutôt bien, mais il n’aurait su dire si c’était l’éloignement qui dopait ainsi ses résistances mentales ou les nouveaux médicaments que lui avait prescrits le docteur Wellington.
    
    On signa le contrat en buvant du vin blanc français. Max fit la moue, fit glisser l’alcool de gauche à droite dans sa bouche, fit claquer sa langue comme un grand œnologue. Adrian alluma en tremblant une Marlboro. C’était une rumeur douce qui tenait Bruxelles, loin de la dureté londonienne.
    
    En définitive, il en était venu à détester l’Angleterre. L’ingratitude de ce pays, le sien, lui donnait la nausée. Qu’est-ce que cette maudite île avait bien pu faire pour lui ? Ni reconnaissance, ni succès, ni amour, ni santé. Rien de rien. En avalant son troisième verre de riesling, il décida qu’il resterait tant qu’il le pourrait le plus loin possible de ces terres mouillées et tristes. « Pays de bigots / Pays de taiseux. Vous et votre humour de merde, je vous laisse derrière moi, avec les blouses blanches, avec Mary, avec votre aveuglement ». « Quoique », ricana-t-il dans son coin, « la Belgique n’est pas forcément le meilleur endroit pour oublier l’Angleterre ».
    
    *
    
    Prince était dans l’air du temps, et somme toute, Adrian ne trouvait pas la chose désagréable comme il ne lui semblait pas déraisonnable d’écouterSign o’ the times en vidant des bières belges alors que le soir tombait sur la grande ville du nord. En ce qui le concernait, l’Europe ...
    ... était devenue un immense pays dont il sillonnerait désormais les régions. Un pays immense et chargé d’Histoire. Il se rappelait des allusions du Velvet et des déclarations d’amour de Roxy Music ; le genre de déclamations qui marquent une génération.
    
    La presse du nord s’intéressait à leur nouvel enregistrement, des Néerlandais, des Allemands, des Belges s’activaient devant les portes du studio de répétition. Le groupe répondait aux questions de façon professionnelle, mais il n’échappait à personne que les sautes d’humeur d’Adrian étaient plus marquées qu’auparavant. Passait d’une vitesse stupéfiante d’un grand état d’exaltation à une phase d’abattement total qui le voyait dormir une journée durant, la main enserrant une bouteille de Whisky comme s’il se fût agi d’un glaive de verre.
    
    L’énergie revenait soudain comme elle était partie, une vraie centrale atomique sans contrôleur. Alors, sa créativité s’exprimait avec force, sans retenue, fidèle et fougueuse créature qu’il savait chevaucher. Max rigolait, heureux, comme toujours. Mais Michael faisait la moue, Michael prenait sur lui, Michael disait « on ne va nulle part avec lui. On court après quelque chose qu’il ne peut pas atteindre ». Et pourtant, il aimait ce qu’il entendait. En fait, c’était vraiment bon. Le meilleur de ce qu’ils avaient produit tous les quatre. Dans ses textes, Adrian abordait de façon plus ouverte les affres de sa maladie.
    
    Michael l’observait encore de temps à autre avec affection, dans les moments ...
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