Adrian
Datte: 13/08/2018,
Catégories:
nonéro,
portrait,
journal,
Auteur: HugoH, Source: Revebebe
... concerts. Cette idée le dépita, et il eut de la reconnaissance pour les calmants taille XXL qu’on venait de lui prescrire et qui ralentissaient tellement son émotivité, la concassait jusqu’à ce qu’elle devienne tolérable.
Plus loin, sur de vastes étendues d’herbe, de jeunes blancs-becs écoutaient leLicence to lll des Beastie boys. Il faisait froid, les blousons étaient épais. De la buée s’échappait de sa bouche, il aimait ça. Sacré soleil quand même ! Il écoutait encore de la musique, de la musique faite par d’autres, même si certaines fois il ressentait un pincement au ventre quand l’artiste lui semblait brillant ou nul, c’était selon, oscillant entre l’envie et le dépit, la jalousie et l’amertume.
Mais il fallait bien reconnaître que 1986 avait été une bonne année.The queen is dead des Smiths,Colour of spring de Talk-talk,Evol de Sonic Youth, les Throwing Muses. Beaucoup de bonnes choses, c’était rassurant et angoissant à la fois. Il s’était mis à la production, avait œuvré pour deux jeunes groupes dans la plus grande confidentialité. Et confidentiels, ils l’étaient restés après son passage. Des mains en or, ma parole, avait plaisanté Max un soir de drogues. Le son l’intéressait, les textures, le pétrissage, il était capable de passer des heures sur la tonalité d’un backing, ou sur le volume d’une boucle de batterie en fade out.
Un vol de moineaux fit vibrer l’air brillant ; encore une fois il inspira profondément tandis que d’autres enfants, inlassablement, ...
... défilaient devant lui. Il n’avait plus de nouvelles de Mary depuis longtemps et il eut soudain envie d’en avoir. Appela d’une cabine rouge vers Kensington Garden / Connaissait le numéro par cœur. Ses doigts avaient dû laisser des empreintes sur tous les téléphones de la capitale. Il y eut une musique indiquant que ce qu’il venait de composer n’était plus valide, merci d’en recomposer un autre, ce qu’il fit dix fois de suite, nerveux et agité, jusqu’à comprendre que vraiment ce numéro n’était plus bon, et que certainement, elle en avait changé. Et peut-être même d’adresse, ressassa-t-il en baissant la tête, les yeux chargés de larmes.
Quel miracle les avait conduits dans ce bureau bruxellois ? Comment Alex avait-il pu dégoter ce contact ? Cela resterait un mystère aussi impénétrable que le Saint-Suaire du Christ. Mais ce qui était certain c’est que ces deux gars, Kenny Gates et Michel Lambot, fondateurs et patrons de PIAS, se tenaient droit devant eux, un stylo à la main. Alex jubilait. Alex, roi de la drogue et du loyer impayé / Alex qui souriait béatement, remuant la tête de gauche à droite alors que les pages de contrat défilaient entre les mains de chaque membre du groupe. Michel Lambot disait :
— On aime vraiment ce que vous faites les gars, tout le monde vous aime en vérité, mais tout le monde ne le sait pas encore.
Kenny Gates rigolait.
— On est sûrs que ça peut marcher, sinon, on ne vous aurait pas fait venir jusque là.
Dehors, la neige tombait dru sur les ...