1. Les cadeaux du hasard


    Datte: 14/06/2018, Catégories: fh, hplusag, jeunes, bain, campagne, caférestau, amour, hdomine, cérébral, revede, Voyeur / Exhib / Nudisme nonéro, mélo, amourdram, prememois, Auteur: Musea, Source: Revebebe

    ... du comptoir des habitués. Un court instant, Claire se demanda si Louis était un assidu de ce genre d’endroit. Il semblait si à l’aise dans ce lieu. Puis elle décida que cela ne la regardait pas et balaya l’image furtive d’autres jeunes femmes pareillement assises en face de lui.
    
    — Et maintenant que je vous ai saoulée avec ma vie, ma musique, parlez-moi de vous, Claire. Enfin, si vous le voulez bien, s’empressa-t-il de rajouter.
    
    La jeune fille, gênée, sourit tristement :
    
    — Vous savez la plus grande partie de mon histoire. Je vis seule depuis la mort de mon père et de ma mère. J’ai repris leur ferme et j’ai demandé mon émancipation. Je m’occupe des ruches, des bêtes et du jardin, et j’arrive bon an mal an à vivre de ce que je produis. Voilà, c’est tout. Il n’y a pas grand-chose à raconter. Sauf peut-être si vous aimez les ragots. Alors là, je peux vous raconter les histoires les plus folles qui courent sur mon compte et qui couraient sur celui de mes parents.
    — Franchement, ça ne m’intéresse pas. Racontez-moi plutôt ce qui vous fait vivre à l’intérieur de vous, vos rêves…
    — Mes rêves ? Je ne sais pas si j’en ai beaucoup. Faire prospérer la ferme, pouvoir faire des économies et réparer les communs, aménager quelques pièces… Voilà, je crois que c’est tout.
    — Vous êtes sûre ? On dirait que vous récitez une liste de devoirs d’école. Ce que vous me dites, ce sont vos obligations, votre désir pour le futur de votre maison. Mais vous, ce que vous attendez de la vie, c’est ...
    ... quoi ?
    
    Claire ouvrit de grands yeux. Jamais encore quelqu’un ne l’avait interpellée aussi intimement. Elle hésita un long moment avant de répondre, cherchant les mots exacts et c’est avec lenteur qu’elle expliqua au luthier ce qu’elle ressentait.
    
    — En fait, je ne sais pas du tout ce que j’attends de la vie. Je crois que je n’y ai jamais vraiment pensé. Ou alors il y a longtemps, comme toutes les petites filles. À l’époque j’aurais voulu être institutrice. Depuis cinq ans, je vis au jour le jour. Alors prendre le temps de réfléchir à ce genre de question, c’est assez difficile. Et puis, c’est quelque chose de très intime.
    — Je comprends. Moi-même, il y a quinze ans, je ne sais pas si j’aurais pu répondre à ce genre de question.
    — Vous, vous avez voyagé, vous avez appris la musique et tant d’autres choses…
    — J’ai vécu à Clermont et à Paris et j’ai fait des rencontres intéressantes, mais cela est plus dû au hasard, à mes apprentissages…
    — Ici, c’est difficile de se projeter en avant. La tradition, les secrets, les réputations, les histoires familiales, c’est quelque chose qui vous colle à la peau et qui vous enferme malgré vous dans des obligations, des comportements… Être libre, c’est prendre des risques.
    — Je l’ai compris en arrivant ici. Mais je crois que cela ne doit pas vous faire peur.
    
    Claire fut blessée de cette remarque. Elle se rebiffa.
    
    — Si j’avais peur, je crois que je serais partie à la mort de mes parents.
    — Peut-être que partir ne signifiait pas ...
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