1. L'au-delà


    Datte: 26/05/2018, Catégories: forêt, campagne, jardin, voyage, nonéro, mélo, Auteur: Musea, Source: Revebebe

    ... chez toi ! »
    
    Un soupir entre peur et espoir. Le vent vif et malicieux gonfle ma jupe.
    
    « Va préparer l’avenir pour nous ! Va ! Tu ne voudrais pas le décevoir, n’est-ce pas ? »
    
    Je me lève. Une silhouette en pull bleu près de la maison me fait signe, venue de nulle part. Cheveux gris et large sourire, yeux délavés pleins de tendresse :
    
    « J’ai confiance en toi, je sais que tu y arriveras ! Je suis toujours là et je veille ici, chez toi, et là-bas. Rien n’a changé ma chérie. La mort n’a pas gagné puisque je suis là. Puisque tu es venue me retrouver. Alors ne t’inquiète pas. Fais tout pour avancer tes projets. Je serai à tes côtés par les amis que j’ai placé autour de toi pour te défendre. Ensemble vous vaincrez parce que votre combat est juste. Parce que la beauté gagnera toujours contre la haine. Aie confiance en moi, ma petite fille, aie confiance en la vie ! Je t’aime et ça, rien ni personne ne pourra te le prendre. »
    
    L’écho répète sa voix tandis que la silhouette disparaît, fumée bleue dans le soleil.
    
    Deux mains sur mes épaules, un baiser sur ma joue trempée de larmes :
    
    — On y va ?
    
    Je n’en ai aucune envie mais je sais qu’il le faut.
    
    Pour lui. Pour la maison. Pour moi aussi.
    
    L’air important, il tapote l’appareil photo comme un coffre au trésor :
    
    — Regarde ! Pendant que tu lui parlais, j’ai mis en boîte tout ce que tu aimes. Désormais, quand tu auras un gros coup de cafard, que le pays te manquera trop, tu pourras y venir sans même prendre de ...
    ... valises.
    
    Et puis tu sais que je suis là aussi, hein ?
    
    — Je sais.
    
    Cette fois, c’est moi qui prends ses mains pour l’empêcher de pleurer.
    
    C’est moi qui serre ce grand gaillard dans mes bras, chaviré du cadeau post-mortem de son ami, de sa présence immobile dans le paysage.
    
    — Et merde, je vais pas m’y mettre aussi ! On a l’air de quoi, hein ? gronde-t-il en reniflant bruyamment.
    — J’en sais rien et je m’en fiche ! Je suis juste heureuse de t’avoir partagé cet endroit. Je crois qu’il aurait aimé t’y inviter s’il avait eu plus de temps. Aujourd’hui, c’est fait. Merci de m’avoir emmenée. Merci d’être là.
    
    Nous remontons le sentier épaule contre épaule jusqu’à la voiture, quittons ces lieux que le soleil de juillet inonde, apaisés, vivifiés.
    
    Je reviendrai c’est certain, seule ou avec l’homme. Mais que le temps va me sembler long, d’ici à la prochaine fois.
    
    La Limagne à nouveau gagne sur la forêt.
    
    Les tournesols alternent avec les blés ondoyants.
    
    Bientôt le village et le pain à prendre chez le boulanger.
    
    Puis la maison croulant sous les roses et les géraniums. Les pinsons et le merle attablés dans le cerisier de la mère Pelat.
    
    Dans la salle à manger, la comtoise ancienne s’est arrêtée à l’heure où nous repartions de là-haut. D’un geste sûr et quelques tours de manivelle, il relance le balancier et d’une voix rauque :
    
    — Tu vois, si tu t’en vas, elle s’arrête. Alors, promets-moi que tu reviendras ici aussi. Promets-moi de rester encore longtemps sur ...
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