1. L'au-delà


    Datte: 26/05/2018, Catégories: forêt, campagne, jardin, voyage, nonéro, mélo, Auteur: Musea, Source: Revebebe

    Il existe des lieux où l’on a plus besoin de rien.
    
    Le genre d’endroit où vous pouvez respirer sans vous en rendre compte. Où les choses les plus simples reprennent leur dimension exacte, à la fois immuable et changeante.
    
    Elles en deviennent presque plus présentes finalement qu’à l’ordinaire.
    
    Parce qu’alors vous les voyez ces choses telles qu’elles veulent se montrer à vous.
    
    C’est votre rapport entier au monde qui tout à coup s’étoffe de mille couleurs, de mille parfums, devient tangible, s’ancre et vous fait tanguer, palpiter.
    
    Vous sentez l’air, votre air, votre corps, les pores de votre peau, votre souffle plus clair ; votre place est là, sans que vous parveniez à savoir comment ou pourquoi.
    
    La terre a rampé jusqu’à vous et s’est insinuée au creux de votre chair pour vous emplir d’elle.
    
    Sournoisement, presque malgré vous. Vous ne pouvez pas protester parce que vous n’en avez pas envie, pas le courage… Le sentiment d’abandon est total.
    
    J’écris "abandon" et je réalise à quel point ce mot, qui peut-être tellement déchirant, horrible, peut aussi être beau et apaisant. Une sorte de dualité à lui seul, de contradiction la plus absolue, la plus intime et la plus foudroyante. C’est l’amour et la mort, Éros et Thanatos mêlés. C’est finalement toute une vie, qui peut être résumée avec ce simple mot : abandon.
    
    Par amour, on abandonne sa vie d’enfance pour s’abandonner dans les bras d’un homme, d’une femme, peut-être par la suite donner la vie et abandonner ...
    ... ses repères pour mieux devenir parent, puis grand-parent.
    
    Chaque étape de l’existence est un abandon, une couche de soi qui tombe. Qui révèle une autre couche, puis une autre, sans que nous sachions, parfois, ce qu’ont été nos choix véritables dans cette affaire, ce que nous verrons de nous grâce à ce dénuement consenti.
    
    Nous sommes pourtant arrivés nus au monde.
    
    Malgré cela nous n’avons jamais fini de nous dévêtir jusqu’à la mort, et ce jusqu’à nos cendres.
    
    Troublant, n’est-ce pas ? Surtout quand on pense à tous ceux qui font de leur vie une chasse impitoyable à la richesse matérielle, quitte à voler le bien des autres, quitte à tuer. Quel reniement de leur humanité ! Ils n’emporteront rien au bord de la tombe et pire, mais ils ne le savent pas, le peu qu’ils auront cru garder, tout ce qui flattait leur orgueil, leur sera enlevé.
    
    Pour ceux qui s’abandonnent, comme moi aujourd’hui, au milieu de ces dépouillements successifs guidés par la nécessité, silencieux et solitaires - parce que l’âme, pour grandir, progresser dans la sagesse universelle, se doit d’être seule - il existe des moments et des endroits où vous reprenez des forces. Havres de paix où la nature vous réinvente, où chaque minute passée rend le cœur content.
    
    D’être là et d’être bien. Hors du vacarme des rues, des conflits, de tout ce qui agite l’humain en énergie futile. La plénitude nous surprend alors que nous nous croyions si pauvres, si démunis de tout… et nous nous découvrons soudain si ...
«1234...7»