1. rioriM


    Datte: 14/05/2018, Catégories: frousses, nopéné, nonéro, sorcelleri, fantastiq, Auteur: Radagast, Source: Revebebe

    ... rousseur, le menton volontaire, une grande bouche aux lèvres épaisses et pulpeuses, le front haut et les sourcils fins, très clairs, joliment arrondis.
    
    Puis ce regard ! Des yeux d’ambre.
    
    Devant moi se tient une très jeune femme, d’une beauté éblouissante. Je ne vois d’elle que son visage et ses épaules vêtues d’un corsage boutonné jusque sous le menton. Une médaille pend sur sa poitrine.
    
    Comme un idiot je lève la main pour vérifier si quelqu’un ne se trouve pas à mes côtés. Bien évidemment je ne trouve que le vide.
    
    Mon reflet se tourne vers la jeune beauté. Son regard d’ambre ne quitte pas le mien. Je pars à reculons, puis me réfugie dans ma chambre en claquant des dents et des fesses.
    
    Planqué sous la couette j’entends sonner les heures à la cloche de l’église, je laisse même la lumière allumée.
    
    Demain, je me casse !
    
    Le chant des oiseaux me réveille, j’ai tout de même réussi à m’endormir. Le soleil brille, je me dis que j’ai dû faire un cauchemar provoqué par l’ambiance étrange de cette maison, la fatigue et surtout les histoires à la con du René.
    
    Pourtant ce rêve me semblait bien réel. Le miroir de la salle de bain porte encore les traces de mes doigts.
    
    Après le petit déjeuner, je vais à la ville voisine. Je veux vérifier quelque chose avant de décider si je quitte ou non cette demeure.
    
    L’hôpital Sainte-Anne ressemble plus à une prison haute sécurité qu’à un centre de soins. Un gros bloc de béton entouré d’un mur.
    
    Je demande à rencontrer ...
    ... Philippe Lebel, l’ancien propriétaire du manoir.
    
    — Vous n’en tirerez pas grand-chose, me dit le médecin à l’accueil. Il passe ses journées assis, inerte, occupé à étudier le mur ou la vitre devant lui.
    — Je vais quand même tenter le coup.
    
    Dans une chambre un homme est assis face à la fenêtre. Le visage rond et bonhomme, les cheveux blancs ; son regard absent fixe le vide. Il ne réagit pas à mon entrée.
    
    Je m’assieds face à lui.
    
    — Monsieur Lebel, pourrais-je…
    
    Il se lève, écarquille les yeux.
    
    — Vous l’avez vue ! Vous aussi, vous l’avez vue ! Je le sens, je le sais.
    
    Il s’agite, crie, agrippe ma veste, pousse des hurlements à tel point qu’un médecin et deux infirmiers rappliquent, et tentent de le maîtriser.
    
    — Je ne sais pas ce que vous lui avez fait, mais c’est la première fois en quinze ans qu’on l’entend parler et qu’il bouge.
    — Je lui ai à peine dit un mot !
    — Sortez, on va le sédater, ordonne le médecin.
    
    Je m’apprête à quitter la pièce quand Lebel me crie d’un air désespéré :
    
    — Allez au cimetière, vous comprendrez.
    
    Pour un gars qui ne parle plus, il est plutôt prolixe.
    
    ooOOoo
    
    Secoué, je rentre chez moi. Je marque une légère hésitation à l’entrée du village. Là-bas, à côté de l’église, se trouve le cimetière. J’entends encore le cri de ce pauvre gars. Sans m’en rendre compte, je me dirige vers le clocher.
    
    J’y erre longtemps, dans ce cimetière, je me perds dans la partie la plus ancienne et j’y trouve enfin le tombeau de la famille ...
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