Montmartre
Datte: 28/04/2021,
Catégories:
fh,
hplusag,
historiqu,
Auteur: Jane Does, Source: Revebebe
... demande. Comment lui refuser après l’avoir presque mis les quatre fers en l’air ? Je lui décochai ma plus belle risette.
— Je me prénomme Paul et je suis peintre.
— Ah ! Un de ceux qui fréquentent le quartier ?
— C’est cela ! Il est vrai que nous sommes plutôt nombreux. Mais le Sacré-Cœur attire les artistes et la butte est renommée, bien au-delà de nos frontières. Venez, ne restons pas là. Parce que, voyez-vous, malgré tout ce que l’on pense, ici aussi certains visiteurs sont… indésirables.
Une patrouille formée d’une douzaine de soldats arrivait près du monument à la mémoire du peintre Théophile-Alexandre Steinlen et sa fontaine. L’inconnu, ce Paul, m’avait pris par la main et les bochespassèrent à quelques mètres de nous. Aucun ne jeta un coup d’œil à ce qui pour eux ne devait être qu’un père et sa fille déambulant dans le parc. Paul m’emmenait rapidement dans de petites ruelles et nousfinîmes attablés « chez la Mère Catherine ». Et alors que nous sirotions un verre de vin blanc frais, l’homme me faisait une cour effrénée.
— Si j’osais mademoiselle, je vous demanderais votre prénom…
— Bien vu, Monsieur Paul, je ne me suis pas présentée… Charlotte et je vis aussi à Montmartre.
— Seriez-vous également une artiste ? Dans quel domaine ?
— Que non, ma foi. Ma famille est du nord de la France et… je vis à Paris depuis un peu avant les hostilités.
— Vous me semblez bien jeune pour vivre seule dans ce monstre parisien qu’est la butte !
— Je ne suis pas toujours ...
... seule. Ma mère est chez moi et j’ai aussi une vieille tante dans ce quartier. Une bonne amie également… une véritable Parisienne qui a pignon sur rue.
— Bien ! Vous voilà donc bien entourée et moi qui comptais sur votre grande solitude pour vous proposer mon amitié… quel dommage.
— Tant qu’il ne s’agit que d’amitié… pourquoi pas ?
— Mais vous êtes bien majeure, au moins ?
— Dans quelques semaines, oui, encore un peu de patience.
— Je vous trouve bien pressée de voir la vie vous couler entre les doigts… tenez, regardez…
Le nommé Paul avait sorti de sa poche une sorte de gros crayon et sur le coin de la nappe de papier blanche, en deux ou trois minutes, il dessinait mon visage. C’était si ressemblant que j’avais l’impression qu’il me présentait un miroir lorsqu’il eut déchiré le morceau de dessus de table pour me l’offrir.
— Tenez ! C’est pour la plus belle femme rencontrée à Paris aujourd’hui.
— C’est… beau ! Oh Merci ! Vous avez un bon coup de patte…
— J’aimerais que vous veniez poser pour moi… vous seriez rémunérée bien sûr…
— Je ne sais pas si ce serait convenable…
— Mon Dieu, les convenances de nos jours ! C’est délicieux ce mot dans votre bouche, ma chère enfant. Voici ma carte et s’il vous prenait l’envie de venir me voir…
— … mumm ! Je serais bien tentée, mais… je ne sais si ma mère et ma tante… seraient d’accord !
— Pourquoi leur en parler ? Ce serait notre secret, voyez-vous ! Il n’est jamais bon de mettre la famille dans la confidence de certains ...