1. Une merveilleuse nuit


    Datte: 06/05/2018, Catégories: fh, hplusag, voyage, pénétratio, fsodo, fantastiqu, Auteur: Bertrand D, Source: Revebebe

    ... dimanche, Monsieur n’est pas venu à la messe. Firmin et Mélanie sont restés muets. Le dimanche suivant, la carriole s’est arrêtée sur la place, Monsieur en est descendu, puis a tendu la main à une merveilleuse jeune demoiselle de guère plus de vingt ans. Il nous l’a présentée comme sa fiancée, Bérengère. Le contraste était terrible entre cette magnifique fille et ce vieil homme défiguré. Mais tous deux paraissaient formidablement heureux.
    
    À parti de ce moment là, nous avons continué d’aller travailler au château, mais plus de privautés. Je les ai beaucoup regrettées. Le mariage a eu lieu le samedi 15 mai 1920. Tout le village a participé à la préparation de la noce, et tout le monde a été invité. Cela a été une fête extraordinaire. Quelques mois plus tard, nous avons constaté que Bérengère était en voie de famille comme l’on disait. Elle n’est plus venue à la messe les dimanches d’hiver. Ici, il fait très froid. Mais Monsieur rajeunissait, l’idée d’avoir une descendance.
    
    Et il n’en a pas eu. Bérengère est morte en couches et son fils aussi. Tout le village a pris le deuil, nous aimions tant Monsieur. L’enterrement a eu lieu le mardi 15 février 1921, dans le tombeau de famille qui se trouvait dans la propriété. Il faisait un froid terrible, mais tout le village était là.
    
    Le soir, tous les habitants sont restés comme toutes les veillées d’hiver, cloîtrés chez eux, au chaud, autour de la cheminée. En sortant voir ses bêtes à l’écurie, vers minuit, Adrien a d’abord ...
    ... senti une odeur de brûlé, puis, en allant derrière la grange, il a vu le château en flamme. On a sonné le tocsin. Tout le monde s’est levé, s’est précipité, mais il n’y avait plus rien à faire. On aurait cru qu’on avait allumé plusieurs feux dans cette maison. Dans la journée, les gendarmes sont venus. Monsieur et ses serviteurs avaient disparu, probablement dans l’incendie.
    
    N’ayant pas de descendant, la propriété est revenue à l’État, elle est domaine public. Un entrepreneur a acheté le droit de récupérer tout ce qui était encore bon. Et la grille s’est refermée à jamais.
    
    — Voila l’histoire de Monsieur et du château. Mais petite, pourquoi pleures-tu ?
    
    J’ai entrouvert ma robe et j’ai montré mon collier. La vieille est restée sans voix. Puis elle a souri et elle aussi a fait pareil. Nous avions le même bijou, avec le même motif gravé.
    
    — Toi aussi tu es allée au château ?
    — Oui, mais moi, cette nuit, je lui ai répondu.
    — Le soir même de l’incendie, j’étais tellement triste, comme folle, je suis revenue au château. Et là, j’ai cru avoir perdu la raison. La bâtisse était là intacte, on aurait cru que l’incendie n’avait pas eu lieu. Je suis allé jusqu’à la porte, j’ai frappé, Firmin m’a ouvert. Monsieur et ses domestiques étaient là, vivants. J’ai cru rêver. Et j’ai passé la plus merveilleuse nuit d’amour de ma vie.
    
    Le lendemain, on m’a retrouvée allongée sur l’herbe près des ruines. Tout le monde a pensé que j’étais folle ! Passer la nuit dehors en hiver ! Je me suis ...
«12...6789»