Le cavalier de l'Empereur
Datte: 05/05/2018,
Catégories:
fh,
fbi,
hplusag,
uniforme,
campagne,
voyage,
amour,
Oral
aventure,
historiqu,
Auteur: Margeride, Source: Revebebe
... dans sa rêverie. En passant devant le Musée Grévin, elle fut tentée d’entrer mais elle poursuivit son chemin. Elle s’arrêta à la boutique de la Comédie Française, où elle aimait flâner pour se plonger dans l’ambiance du théâtre, elle adorait le théâtre. Elle resta assez longtemps à regarder la Pyramide du Louvres en songeant à l’histoire complètement folle qu’elle avait racontée à Rignac la veille, sur la péniche. Elle commençait à ne plus sentir ses jambes : la fatigue et le froid. Elle décida de rentrer chez elle. Mais, en passant place de l’Odéon, elle prit une autre direction.
Lorsqu’elle entra dans la salle presque vide du Grand Bara, seul un vieux au visage ridé comme un fruit desséché, sirotait un verre de vin assis seul près de la porte. Il avait un regard d’un bleu délavé incroyablement intense. Oudinot, debout derrière son bar lisait le journal, elle remarqua qu’il portait des lunettes rondes posées sur le bout de son nez, ce qu’elle trouva amusant. Il sourit en la reconnaissant.
— Tiens donc ! Bonjour demoiselle, il vous a trouvée ?
— Oui…
Sans lui demander son avis, il lui servit un porto.
— Ça n’a pas l’air d’aller ? Vous semblez triste ou non, plutôt bouleversée, oui bouleversée… Je me trompe ?
— Non, enfin je sais pas…
— Si vous êtes là, c’est pour parler… Ici les gens ont souvent envie de parler, il n’y a plus beaucoup de confesseurs, il reste les bistros…
— Vous le connaissez bien…
— Oui, enfin peut-être, je crois… Comment dire, on se ...
... comprend… Venez, on va aller derrière, c’est plus tranquille.
Il se tourna vers le vieux qui, perdu dans ses songes, semblait fixer un point sur le mur sans le voir.
— Mon colonel, je vais derrière un moment, pouvez-vous m’appeler si on me cherche ?
— Affirmatif.
La voix était étonnamment forte, avec un accent alsacien marqué. Charlotte trouva étrange qu’une telle voix puisse sortir d’un corps d’apparence aussi frêle.
— Merci, mon colonel. Le vieux replongea dans sa rêverie.
Ils passèrent dans une petite salle derrière le comptoir, meublée comme un salon anglais, les murs étaient tendus de velours vert, avec pour seule décoration une photo en noir et blanc encadrée : Un homme, en treillis, coiffé d’un béret de parachutiste, la poitrine couverte de médailles, le visage émacié projeté vers l’avant comme le bec d’un oiseau de proie, avec cette dédicace « Le général Bigeard à l’adjudant-chef Oudinot, en souvenir de leur rencontre. Paris le 14 juillet 1997. Marcel Bigeard ».
— Il est passé au bar un soir de 14 juillet avec des anciens de son régiment, il m’a donné cette photo, elle a été prise en Indochine, il était commandant à l’époque. Il avait avec lui le vieux qui est dans la salle, le lieutenant-colonel Kreister, une figure : la Résistance, déporté à Dachau et puis l’Indo dans les commandos de choc, la RC 4, Diên-Biên-Phu, les camps du Vietminh, l’Algérie et, pour finir, six ans de taule. Il était mouillé jusqu’au cou dans le putsch d’Alger… Enfin, c’est pas pour ...