Le cavalier de l'Empereur
Datte: 05/05/2018,
Catégories:
fh,
fbi,
hplusag,
uniforme,
campagne,
voyage,
amour,
Oral
aventure,
historiqu,
Auteur: Margeride, Source: Revebebe
Le capitaine de vaisseau Rignac a mis fin à une brillante carrière d’officier de marine qui ne correspondait plus à ses rêves de jeunesse. Esthète, habité par ses souvenirs, il mène une vie confortable mais assez solitaire. Par une fin d’après-midi pluvieuse, il rencontre dans un bar de Saint-Germain-des-Prés une jeune femme, Charlotte, qui évoque pour lui un tableau de Monet « la femme à l’Ombrelle ». Portés par une attirance réciproque qui les inquiète et les fascine, ces deux êtres entament une liaison passionnée. Après une première nuit d’amour, Charlotte découvre que son amant est le descendant d’un ancien paysan de la région de la Margeride devenu général d’Empire.
Perdue quelque part entre la Lozère, la Haute-Loire et le Cantal, la Margeride est un havre de verdure. C’est un endroit de rêve pour « bobos » épris de tourisme vert. Mais à la fin du XVIIIe siècle, la Margeride, c’est le bout du monde : un pays âpre, des vallées encaissées, des forêts de pins et de hêtres, des landes à peine égayées par quelques genêts.
L’hiver un froid sec, glacial, vous pénètre. Lorsque le vent se déchaîne, on se sent abandonné dans un paysage figé de Jugement Dernier. Il n’est pas rare, vers le mois de février que le thermomètre descende autour de — 30°. Parfois, la neige survient dès septembre et ne repart qu’en mai. C’est un pays qui forge le caractère. Un pays beau, mais d’une beauté sauvage, qui se mérite. Les villages sont isolés. Çà et là quelques fermes apparaissent au ...
... détour d’un bosquet. Les chemins carrossables sont rares, on est loin de tout.
Les paysans ne sont ni très prospères, ni misérables, ils vivotent. On élève des moutons et parfois quelques vaches ou un cochon dont la viande salée vient améliorer l’ordinaire des jours de fête. Il y a seulement une trentaine d’années que la Bête du Gévaudan a fini de hanter ces lieux, mais son souvenir est toujours là. Le soir, on ferme soigneusement les portes des maisons et on évite d’évoquer ces jours de terreur. Les rares fois où l’on ose en parler, on dit seulement « La Bête », et les femmes se signent en entendant ces mots. Beaucoup sont encore persuadés qu’elle n’était pas un animal mais une créature venue de l’Enfer, un châtiment divin annonçant l’Apocalypse.
En cette fin d’après-midi de novembre 1798, un homme avance d’un pas résolu sur un chemin creux, au milieu d’un paysage sibérien. Il est chaudement vêtu d’une veste en peau de mouton, le bonnet enfoncé jusqu’aux yeux. Il s’aide, pour avancer dans la neige compacte qui recouvre le sol gelé, d’un solide bâton ferré. C’est Pierre Desbois. Il n’a que seize ans mais c’est déjà un colosse. Quelles que soient les rigueurs météorologiques, dès que les travaux de la ferme de ses grands-parents lui laissent quelques loisirs, il aime parcourir les landes et les forêts. Il est sans doute le seul de tout le pays qui regrette de n’avoir pas vécu au temps de « La Bête ». « Pour sûr je l’aurais tuée et tout seul encore, cette charogne » a-t-il ...