Le cavalier de l'Empereur
Datte: 05/05/2018,
Catégories:
fh,
fbi,
hplusag,
uniforme,
campagne,
voyage,
amour,
Oral
aventure,
historiqu,
Auteur: Margeride, Source: Revebebe
... lumière vacillante d’une bougie, il avait écrit ces quelques lignes :
— Rignac, le 8 Fructidor An X
À Monsieur le Général de Division
André Masséna
Mon Bien-Aimé Frère,
Le jeune Pierre Desbois souhaite embrasser la carrière des armes. Il est honnête, brave et instruit. Je le recommande à votre fraternelle bienveillance.
Baisers fraternels.
Abbé Dosière.
Il plia la feuille de papier, la cacheta avec un peu de cire et la remit à Pierre.
Dosière avait bien connu Masséna alors qu’ils fréquentaient tous deux la loge maçonnique « Sainte Caroline » à Paris. Le général, bien qu’en disgrâce suite à la capitulation de Gênes, qui lui avait valu de perdre le commandement de l’armée d’Italie, gardait de l’influence. C’est ainsi que Pierre fut affecté à un régiment d’élite, le 12ème de Cuirassiers et que, chevauchant dans la nuit parmi les 2600 cavaliers de la division Nansouty, il avançait vers son premier combat.
Le martèlement de milliers de sabots, les bruits de voix étouffés, le cliquetis des armes, créaient une ambiance extraordinaire. Parfois, lorsque la lune apparaissait entre les nuages, on discernait des silhouettes un peu fantomatiques. C’était des régiments qui avançaient. Toute la Réserve Générale de cavalerie était sur les traces des débris de l’armée prussienne. Pierre chevauchait juste derrière l’état-major du régiment. Une compagnie ouvrait la route, deux étaient placées en protection sur les flancs pour prévenir toute mauvaise surprise. Il ...
... ressentait une intense excitation alors que s’approchait l’heure de vérité, le moment où, pour la première fois, il affronterait un ennemi. Bercé par le pas de son cheval, il repensait à sa visite à Masséna, quatre années auparavant.
Le général s’était retiré dans sa propriété de Rueil, que l’on n’appelait pas encore « Rueil-Malmaison », et qui n’était autre que l’ancien château de Richelieu où, dit-on, Louis XIV enfant s’était réfugié pendant la Fronde. Le voyage vers l’Île-de-France fut une véritable expédition, cahots, routes défoncées, courtes nuits dans les écuries des relais de poste. Heureusement, grâce à quelques pièces données par Dosière, Pierre avait pu prendre la diligence. Malgré l’inconfort, ce périple fut pour lui une révélation. Tout ce qu’il voyait lui paraissait extraordinaires : ces villes fières, Clermont-Ferrand, Moulins, Nevers… ces fleuves, l’Allier et la Loire, la Loire surtout qui lui parut si majestueuse. Les forêts, elles aussi, étaient bien différentes de celles de sa Margeride natale, pas de buissons, ni d’arbrisseaux, pas de rocailles mais des arbres immenses, à perte de vue, dont les branches lui faisaient penser à la voûte d’une église. Il se sentait vivre, le monde s’offrait à lui. En découvrant la petite ville de Rueil, vers la fin d’un après-midi, il n’en crut pas ses yeux : elle lui parut si grande avec ses immeubles gigantesques, ses hôtels particuliers au milieu de parcs magnifiques, ce grouillement de gens, de chevaux, de voitures, ces ...