1. Le cavalier de l'Empereur


    Datte: 05/05/2018, Catégories: fh, fbi, hplusag, uniforme, campagne, voyage, amour, Oral aventure, historiqu, Auteur: Margeride, Source: Revebebe

    ... gaillardement ses vingt ans, qu’ils filaient dans l’atmosphère un peu cotonneuse de cette nuit d’hiver. Rignac conduisait en souplesse, sans brutaliser les deux tonnes du vénérable engin, propulsé allègrement par son énorme moteur huit cylindres à la consommation gargantuesque. Sur une longue ligne droite longeant la Loire, brillante comme un miroir, ils firent frissonner un radar de la maréchaussée. Mais les pandores n’insistèrent pas en remarquant, négligemment rangée à côté du permis de conduire, sa carte d’officier.
    
    Ils roulaient depuis trois heures environ, lorsqu’ils atteignirent la petite ville de Cosne-Cours-sur-Loire. Ils décidèrent de passer la nuit dans une auberge confortable, au centre du village, une de ces auberges au style un peu désuet où l’on a envie de se laisser vivre. Leur chambre, meublée dans un style campagnard sentait bon la cire et le linge frais. Le lit, un peu étroit, était recouvert d’un de ces édredons épais, sous lesquels il est tellement délicieux de se glisser lorsqu’il fait froid au dehors. Ils avaient faim. En descendant à la salle à manger, Rignac montra à Charlotte une plaque en cuivre vissée au-dessus de la porte :
    
    « Le Général Desbois, Baron de Rignac, Aide de Camp de l’Empereur a passé la nuit ici le 18 mars 1815. »
    
    — Tu m’emmènes sur ses traces ?
    — Oui, un peu. Après le départ de Napoléon pour l’Île d’Elbe, il s’était retiré à Rignac avec son épouse et leurs enfants. Ce fut peut-être la période la plus heureuse de sa vie, ...
    ... la plus paisible et la plus douce en tout cas. Ils voyagèrent en Provence, en Italie, en Irlande, ils profitèrent de leur propriété, passèrent quelques temps à Paris… Mais dès que Pierre apprit le retour de l’Empereur, il partit se mettre de nouveau à son service. Contrairement à beaucoup d’officiers, il n’avait pas cherché à se placer auprès du gouvernement de Louis XVIII. Son étape dans cette auberge, c’est un peu le début du dernier acte d’une histoire qui commence au soir de la bataille d’Iéna.
    
    Il devait être trois heures du matin lorsque Pierre fut éveillé par le bruit d’une galopade. Il s’extirpa de sous sa couverture et vit que l’on avait ravivé le feu près du bivouac de l’état-major du régiment. Enveloppé dans un manteau, coiffé d’un bonnet de police, Le colonel Dornès qui venait de remplacer le colonel Belfort, à la tête du 12ème régiment de cuirassiers, était en grande conversation avec les deux chefs d’escadrons et un officier supérieur que son pantalon rouge désignait comme l’un des aides de camp du maréchal Berthier, major-général de la Grande Armée. Quelques instants plus tard, le trompette-major, Valcogne, arriva au pas de course, vêtu d’une simple chemise malgré le froid mordant. Dornès lui donna un ordre que Pierre ne comprit pas et Valcogne emboucha son instrument pour sonner le réveil.
    
    Comme par magie, le camp endormi s’anima, les commandants de compagnie se précipitèrent vers le colonel pour prendre les ordres. Les sous-officiers houspillaient les ...
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