Les moches sont les pires des salopes
Datte: 11/10/2020,
Catégories:
fh,
couleurs,
complexe,
laid(e)s,
ffontaine,
Auteur: Laure Topigne, Source: Revebebe
... lui rappelai alors ce que je lui avais déclaré un peu plus tôt, à savoir qu’elle dispensait des leçons de vie.
Je tentai de la questionner sur son existence et ses projets. Elle éluda la plupart de mes questions et je ne pus en tirer que de vagues renseignements que je connaissais ou dont je me doutais déjà. Je la sentais mal à l’aise et presque sur la défensive, ce qui me décida à ne pas insister. Pénétrant mon dépit, elle me dit :
— Je n’ai aucune envie d’entretenir à votre égard de quelconques cachotteries ; mais outre celui de ma maladie, il me reste deux autres secrets à vous confier. Ils n’ont, je vous en assure, aucun caractère honteux, et je vous les livrerai au moment opportun que, croyez-le, moi, je brûle de voir advenir.
Je pris sa main et répondis simplement :
— Je vous crois, bien sûr, et saurai attendre.
Puis dans un geste totalement irraisonné, je saisis son doigt endolori en lui déclarant :
— Je vous remercie pour ce cadeau d’autant plus que je me doute des difficultés qui ont entouré sa réalisation.
Je portai ensuite son doigt à ma bouche pour l’y happer et le sucer goulûment, entourant les stigmates de la blessure des caresses de ma langue, de manière très peu équivoque. Elle s’empourpra vivement mais me laissa faire quelques instants avant de me le retirer lentement en minaudant, confuse :
— Quel gamin vous faites… Se comporte-t-on ainsi en public ? Avant d’ajouter, rêveuse : Et dire que j’ai aimé cela.
— Je ne voulais que mettre ...
... un peu de baume sur cette cicatrice que l’un de mes caprices vous a infligée. J’estime à leur vraie valeur les résistances et les douleurs que cette entreprise a dû susciter et m’offre à remplacer au plus vite cette perte par un bijou mieux adapté.
— Cessez donc de vous prendre pour le père Noël et de vouloir m’ébaudir avec vos colifichets. Un seul de ces sourires que vous me consacrez sincèrement les remplace tous avantageusement et peut me dédommager de la perte de ce talisman ; mais l’heure tourne, et déjà je dois vous quitter. Je ne saurais néanmoins clore cette charmante entrevue avant de m’acquitter d’un dernier aveu. Je le subodorais en entrant ici auparavant, mais en suis persuadée maintenant et pense que, plus que moi, vous deviez en être au fait : sans l’ombre d’un doute je crois – non pas, je suis sûre – d’être en passe de tomber amoureuse de vous !
Je ne sus que répondre ; au reste, elle ne m’en laissa guère le temps. Elle se leva, déposa un rapide baiser sur mon front en disant :
— J’espèrete revoir vendredi prochain.
Elle disparut presque légère, en tout cas, boitant moins qu’à l’accoutumée.
Voilà qu’une fois encore elle me lâchait, interloqué, au seuil de mille interrogations qui allaient alimenter une semaine de méditation pleine d’expectatives. Je ne l’avais que très peu ou pas courtisée, et elle se jetait à mon cou. André et ses propos cyniques ressurgissaient. Je ne livrerai pas au papier toutes les questions et les conjectures en lesquelles ...