La lettre
Datte: 29/07/2020,
Catégories:
hplusag,
nopéné,
Auteur: Oxalis, Source: Revebebe
... à – ces trois années où nous nous sommes perdus de vue, nous n’avons jamais été aussi proches. Et je me sais extraordinairement réceptive à son charme, ce soir… malgré les dix-neuf années qui nous séparent. Je me rappelle soudain sa terreur d’approcher des quarante ans, et esquisse un sourire énigmatique, qui ne passe pas inaperçu. Adam me demande ce qu’il y a de drôle, et je le lui dis.
— Tu me trouves vieux ? murmure-t-il, sans préavis.
Silence. J’ai brusquement conscience de la tension un peu déconcertante qui renaît entre nous.
— Non.
Et je crois que cela commença à ce moment.
Adam se dirige vers sa veste, la prend, me lance un regard étrange et plein de mystère. Comme dans un rêve, je m’approche de lui.
— Au revoir, lui dis-je, un peu stupidement, me penchant, prenant son attaché-case, lui tendant.
— Non ? répète-t-il, sans paraître avoir entendu mon salut.
Il m’observe fixement, sans faire un mouvement. Je lui retourne ce regard, souriant un peu, d’un air gêné, serrant toujours son attaché-case dans la main. Il ne le prend pas.
Je suis parcourue de l’envie furieuse de le lui balancer à la figure.
— Arrêtez de… arrête de me fixer ainsi, c’est vraiment désagréable, finis-je par murmurer d’une voix qui m’apparaît horriblement tremblante.
Il ne bouge pas d’un cil, toujours immobile. J’ai la soudaine impression qu’il s’est rapproché de moi, tant est fort le sentiment de chaleur qui se dégage de lui, alors qu’il n’a pas fait un pas.
Je ...
... déglutis péniblement, baisse les yeux, et au moment où je vais reculer, incapable de supporter la tension, il tend enfin son bras droit et prend doucement la poignée de sa mallette, effleurant puis caressant sans pudeur mes doigts crispés, et les desserrant d’autour de la poignée. Je tente de la lâcher, puisqu’il la tient désormais, mais sa main couvre toujours la mienne, la serrant, doucement. Mon cœur bat à coups redoublés dans ma poitrine ; je lève les yeux. Il n’a pas changé d’expression mais son regard bleu brille d’un feu étrange.
Je ne parviens plus à sourire. Sans prévenir et d’une manière tout à fait traîtresse, des larmes soudaines remplissent mes yeux et je détourne la tête.
— Je t’en prie… chuchoté-je alors d’une pauvre voix pitoyable, sans bien savoir pourquoi j’ai dit ça.
Sa main est chaude. C’est la première fois qu’il me touche de cette manière, et ça me fait un effet monstre. De son autre main, qu’il presse doucement contre ma joue, il m’oblige à tourner la tête vers lui et à le regarder droit dans les yeux.
Je ne veux pas, absolument pas, qu’il m’embrasse ; c’est un de mes anciens professeurs, je le désire parce qu’il est séduisant, mais je n’éprouve rien de particulier pour lui, hormis une affection profonde qui tient lieu d’amitié, car je l’ai toujours considéré comme un être supérieur et intouchable. Son regard a pourtant quelque chose d’hypnotique, je sens ma bouche frémir, mon corps entier se crisper. Réagir.
Il a posé sa main sur ma joue, me ...