Fin du monde sur canapé
Datte: 03/06/2020,
Catégories:
sf,
Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe
... crispés sur le shrapnel de verre et d’acier qui émergeait de son larynx, il essayait d’endiguer la cascade bouillonnante poissant sa chemise Armani. Après un ultime hoquet, le type s’immobilisa, les yeux grands ouverts. L’instant d’après, un typhon incandescent déferlait sur la foule hurlante, ne laissant derrière lui qu’un enchevêtrement de silhouettes noircies.
La petite télé posée sur le bar s’éteignit avec un bref grésillement. Une violente secousse fit tanguer le tabouret d’Alain tandis que la lumière se coupait, plongeant l’abri dans le noir. Un placard de cuisine s’ouvrit, déversant au sol un déluge de porcelaine. Alain se mit à jurer, titubant sur la vaisselle brisée, tâtonnant, tel un aveugle, à la recherche d’un briquet où d’une boîte d’allumettes. Un relais s’enclencha enfin, faisant démarrer le groupe électrogène. Avec une lenteur pleine de regrets, les ampoules se rallumèrent.
Toussant et crachant dans l’air saturé de fines particules de plâtre, Alain se précipita vers le sas de décontamination. Il actionna l’ouverture menant au puits d’accès, attendit et… rien ne se passa ! Affolé, il refit une nouvelle tentative. Le lourd panneau de métal refusa à nouveau de coulisser. Une rage intense déchira le voile sombre qui obscurcissait sa vision et engourdissait ses membres. Il se mit à tambouriner sur la porte blindée en hurlant. Élodie et Manon étaient là, dehors, coincées ! Il devait sortir de l’abri, les trouver et les ramener ! Le souffle court, les poings ...
... meurtris, Alain finit par revenir à la raison. Il lui était impossible de manœuvrer le sas. Et ce n’était pas en tapant dessus à mains nues qu’il règlerait quoi que ce soit. Il décrispa les poings et les laissa retomber le long de son corps. C’est alors qu’il remarqua le message menaçant qui défilait en grosses lettres bleues sur l’afficheur, au-dessus de la porte :
La secousse et à présent les radiations… Ça ne pouvait signifier qu’une chose : le cauchemar était devenu réalité. Des têtes nucléaires avaient explosé sur Paris. Sans même réfléchir, Alain pianota le code de sécurité sur le clavier de métal, espérant déverrouiller la porte. Toujours pas de réaction. Le bunker semblait programmé pour assurer une sécurité absolue à ses hôtes, pulsions autodestructrices comprises…
Alain se laissa glisser au sol, le visage enfoui entre ses paumes. La même pensée l’obsédait, encore et encore : Élodie et Manon ! Piégé sous terre, il ne pouvait leur être d’aucune aide… Alain priait pour qu’elles fussent toujours dans le métro. Il doutait de la capacité des transports souterrains à les isoler des radiations durablement, mais c’était là leur unique chance de survie. Un bien mince espoir auquel se raccrocher. Il resta prostré un long moment, songeant à sa mère, à la famille d’Élodie, à leurs amis. Combien d’entre eux vivaient encore ?
Du dos de la main, Alain essuya ses yeux baignés de larmes puis se releva, avec une lenteur de vieillard. Rejoignant le salon d’un pas trainant, il ...