1. La collègue est morte


    Datte: 07/04/2020, Catégories: nonéro, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... yeux, elle remarqua qu’elle était pieds nus. Où avait-elle bien pu mettre ses chaussons ? D’abord, tout simplement, les avait-elle enfilés ?
    
    Elle ne s’en souvenait plus. C’était finalement très bizarre, cette mémoire qui s’obstinait à fuir et à se dérober. Par exemple, il y avait à peine quelques minutes, elle avait regardé son réveil dans sa chambre. Et elle ne se rappelait plus l’heure qu’elle avait pu y lire.
    
    En ce qui concernait le mystère des chaussons disparus, il suffisait pour le résoudre de se rendre dans le vestibule et de les prendre dans le placard à chaussures. Mais Mina était bien trop fatiguée pour avoir la force de confirmer cette interrogation stupide qui consistait à se demander où on avait pu ranger ses chaussons. Aussi retourna-t-elle dans la chambre, se glissa dans son lit, regarda l’heure (20 h 05) et se plaça sur le flanc ; se refusant à éteindre la lumière de sa lampe de chevet.
    
    Bientôt, elle coulait dans un sommeil agité et peuplé de cauchemars, pour finalement se réveiller brusquement une heure plus tard. Elle ouvrit les yeux et constata avec une horreur jamais ressentie qu’elle était dans le vestibule. Assise sur le carrelage froid et dur. Devant elle, ses chaussures tachées de sang se découpaient avec une précision inutile sur la couleur beige du couloir. Ses chaussures qu’elle se rappelait parfaitement avoir jetées dans la poubelle un peu plus tôt dans la soirée.
    
    L’affolement la saisit, et elle se releva lentement, la gorge nouée par ...
    ... une peur insoutenable, ses yeux noyés de larmes terrifiées. Que faisait-elle dans le vestibule ? Qui avait sorti ces maudites chaussures de cette maudite poubelle, dans la cuisine ? Ce n’était pas elle, ce n’était pas possible, elle dormait ! Ou alors… Ou alors, elle était somnambule. Avec une lenteur exaspérante, elle alla chercher des sacs plastiques, revint dans le hall, pas rassurée du tout, tremblante de la tête aux pieds et se mordant convulsivement les lèvres.
    
    Puis elle ramassa les chaussures avec les sacs, avec d’infinies précautions, entra dans la cuisine, jeta le tout par la fenêtre. Le lendemain, elle aviserait du comportement à adopter si quelqu’un reconnaissait ses chaussures au bas de l’immeuble. Pour l’instant, elle avait très peur et s’en souciait comme d’une guigne.
    
    C’était étrange comme son corps avait du mal à se mouvoir normalement, alors que son cerveau lui ordonnait fébrilement de se dépêcher d’aller se recoucher. Elle vérifia avant tout que la porte d’entrée était fermée, que les fenêtres étaient closes, et un faible soulagement la submergea quand elle réalisa que personne n’avait pu entrer. Elle était donc somnambule. Elle se demanda si son comportement était après tout normal, si elle ne devrait pas appeler le docteur qui l’avait examinée dans la journée pour lui faire part de ses hallucinations. Mais comme elle n’avait jamais vécu d’expériences traumatisantes, comme tuer quelqu’un, elle ignorait complètement si son attitude n’était pas l’effet ...
«12...8910...16»