La forêt
Datte: 30/11/2019,
Catégories:
nonéro,
aventure,
fantastiqu,
sorcelleri,
merveille,
Auteur: Gaed, Source: Revebebe
... jour.
Allons, le voyage sera agréable, le soleil dans les yeux, longeant le fleuve, descendant avec lui jusqu’à la mer. Je marcherai des jours et des jours s’il le faut, la nature est bien riche, je pêcherai pour manger.
Ma blessure ne me fait presque plus souffrir. De temps à autre, une pointe se réveille, sans doute pour me rappeler que la mort est passée tout près de moi, mais je me sens mieux, bien mieux.
Je n’ai jamais vu de fleuve si large, si démesurément grand qu’il ressemble à une mer. Noyée sous le soleil, je ne distingue que difficilement l’autre rive où se dessinent en vagues ombres dans la lumière radieuse la silhouette d’autres arbres, le corps d’autres roseaux. Quelquefois, un poisson-ailes bondit hors de l’eau drainant dans son sillage de fines gouttelettes scintillantes.
L’ouest.C’est comme si tout y tendait. De la brise dans mon dos aux bonds des poissons-ailes, du vol des oiseaux au coucher du soleil. Aussi loin que je puisse scruter, le fleuve s’étire, s’accommode du terrain avec aisance, décrit quelques courbes subtiles jusqu’à une lointaine ligne d’horizon.Combien de jours me faudra-t-il marcher pour rallier l’océan ?Il me faut un bâton, un beau bâton de marche. Oui, un homme libre a besoin d’un bâton pour aller où bon lui semble.Je m’approche de la lisière, avise un colymbre de belle facture, mais non, mieux vaut choisir un tallius, bien que moins beau, son bois est plus résistant, de ces matières de besogneux dont on fait les meilleurs ...
... outils.Quelques coups d’épées et l’affaire est entendue, j’affinerai l’objet ce soir lorsque je ferai halte. Mieux vaut reprendre la route le plus tôt possible. Machinalement, sans bien savoir pourquoi, je plante quelques bouts de bois dans la terre.Cinq bouts de bois disposés en cercle.Ce cercle dans lequel j’ai tourné toute ma vie.Maintenant le soleil est dans sa phase déclinante, bientôt le soir viendra. Il ne semble y avoir âme qui vive en ces terres étranges ; toutefois, sur l’autre rive, il m’a semblé apercevoir quelques ombres mouvantes. Des impressions, rien de plus. Ma vue ne porte pas si loin, je ne suis plus si jeune.Où donc ont bien pu passer les deux hommes qui m’accompagnaient ? La brume nous aura séparés, c’est certain. J’ignore où ils se rendaient ni même s’ils s’y rendaient ensemble. Fazel avait l’air décidé à poursuivre sa route avec le chien d’Elvin…Chacun de mes pas me fait saisir la dimension incroyable de ce fleuve. Il m’arrive de sourire béatement devant ce spectacle et je n’ai nul besoin de me reprendre, pourtant, la même question ne cesse de me tarauder l’esprit :Où suis-je ?Mais même si tout est étrange depuis que j’ai quitté le combat, je me sens bien, étonnement bien. Se sent-on de la sorte si l’on est en danger, si la menace nous guette ? De fait, la question de savoir où je suis a-t-elle encore une importance ?Le soleil se meurt à l’ouest embrasant la cime des arbres et la surface de l’eau de mille feux. La vallée se teinte de couleurs rougeoyantes ...