1. La forêt


    Datte: 30/11/2019, Catégories: nonéro, aventure, fantastiqu, sorcelleri, merveille, Auteur: Gaed, Source: Revebebe

    ... suis qu’un petit homme de Dieu, je n’ai pas de dons particuliers, pas d’aptitudes spéciales, je ne suis que l’un de ces nombreux et dévoués serviteurs des plus puissants, du plus puissant. Alors, je ne préfère pas réfléchir, je ne veux pas perdre mon temps pour rien. Si j’ouvrais ma réflexion, peut-être ferais-je demi-tour et reviendrais au combat.
    
    Le feu s’est éteint, les braises sont froides et noires. Je me dresse difficilement, le sol danse sous mes pieds. La fille dort encore. Je m’en approche et remonte sa cape sur son visage.
    
    C’est une bien belle journée qui commence, l’eau du fleuve scintille de toute part, j’ai envie d’y plonger les mains. Mes pieds ripent sur la caillasse glissante, bordée de petites bulles d’écume. Les bras en croix, je m’étire et contemple ce paysage ahurissant de beauté. Mon visage boit le soleil. La vie semble s’être emparée de chaque recoin, de la moindre racine à la plus haute des cimes. La faune est éveillée elle aussi, elle bruit de toute part et ce tout forme comme une musique.
    
    Je plonge mes mains dans le fleuve, l’eau est fraîche. Je m’en asperge le visage. Le remous est faible et les ondulations me renvoient mon reflet pâle. Mes cheveux sales m’arrivent maintenant aux épaules, mes traits sont tirés et, par Lazarre, dans la lumière du matin, que je suis pâle ! La barbe que je n’ai pas rasée depuis des mois prend maintenant naissance à la base du cou et s’étend jusqu’à la moitié de mon visage. Je reste là, agenouillé un long ...
    ... moment, ma main allant et venant sur les poils de mes joues, puis des joues au menton, puis du menton au cou.
    
    Mon cou.
    
    Est-ce possible ?
    
    Je me retourne vivement et cours vers le campement. Sylène dort encore, les yeux fermés, les traits figés dans une expression triste. Elle dort. Je m’agenouille près d’elle. J’ai l’impression qu’elle va se réveiller, mais non, sa respiration reste régulière et ses paupières closes. Ma main tremble lorsque je tire tout doucement le col de sa cape. Le tissu s’affaisse dévoilant dans son sillage une peau laiteuse et ce que j’avais entrevu un peu plus tôt sans vraiment y prêter attention me saute aux yeux dans toute sa violence. Une cicatrice barre toute la largeur du cou, elle est encore rougeoyante et d’une épaisse profondeur. C’est une de ces blessures auxquelles on ne peut survivre. C’est impossible. L’entaille est trop large.
    
    Je détourne mon regard.
    
    Que lui ont-ils fait ?
    
    Elle ouvre les yeux d’un coup, me regarde d’un air incrédule et se met à hurler, hurler sans que je puisse l’arrêter, sans que je puisse même faire un mouvement.
    
    Enfin, elle se calme. Les cris se font halètements, respirations brèves, heurtées de larmes invisibles. Je me suis levé et j’ai reculé de quelques pas pour lui montrer que c’était fini, que je ne lui voulais aucun mal, qu’elle n’avait plus à s’inquiéter. J’aurais aimé lui dire quelque chose, mais les mots ne sont pas venus.
    
    Maintenant elle me regarde préparer mon sac, les jambes repliées sur son ...