Kinshasa - Limete - Histoires de Sexe

Kinshasa - Limete

... assis à son bureau, lève les yeux vers nous, sourit à Lydia, puis repousse sa chaise et vient me serrer la main. C’est la poigne d’un homme familier du pouvoir, ferme, sans être écrasante. Son regard est franc et direct, c’est moi qui baisse instinctivement les yeux.

— Soyez le bienvenu dans cette demeure, Jean. Considérez-la comme la vôtre !
— Vous me faites trop d’honneur !
— Taratata ! Sachez, pour votre gouverne, que le mari de Lydia, enfin son ex-mari, n’a jamais pu mettre les pieds ici !
— Je ne comprends pas !
— Le bonheur de Lydia compte pour moi plus que vous pourriez l’imaginer. Rendez-la heureuse, une semaine, un an ou plus, mais rendez-la heureuse. Elle est trop sérieuse, trop attachée à son travail et à ses enfants. Vous êtes un rayon de soleil dans sa vie ! Vous savez, le bonheur est un ensemble de perles…
— Je lui ai déjà parlé du collier, papa !
— Ah oui ? Je radote un peu parfois, répondit-il
— Non, non, j’ai trouvé l’image très pertinente, au contraire, dis-je

Après avoir marqué un silence, il m’indique un fauteuil et demande à Lydia d’aller chercher des boissons. Une fois seul, il se rapproche de moi et me demande à mi-voix :

— Je n’ai pas compris pourquoi vous avez refusé les deux jeunes filles que vous avait amenées le directeur de l’école à Gemena !
— Ce que vous savez sur moi me fascine. C’est Big Brother au Congo, non ? dis-je en riant un peu jaune.
— C’est un peu cela, en effet. Désolé, mais c’est nécessaire, il s’agit d’enjeux qui ...

... vous dépassent. Mais ne me demandez pas de vous éclairer sur ces propos sibyllins…
— Pour en revenir à ces demoiselles, ce n’est pas parce qu’elles n’étaient pas très jolies, mais parce qu’elles avaient été amenées comme du bétail, soumises à l’autorité, de simples objets et non des personnes. Jamais je n’aurais pu m’abaisser à abuser d’elles, jamais ! C’est contraire à ce que je suis au profond. Je hais l’arbitraire et la coercition !

Je marque un silence.

— Désolé, je me suis emporté, j’ai élevé la voix dans votre propre maison !
— Ce n’est rien. C’est la réponse que j’attendais. Vous êtes bien celui qu’on m’a décrit, un peu naïf, mais plein d’idéal. Savez-vous qu’en refusant, vous avez failli vexer un homme puissant. Le directeur est maintenant sénateur, un proche de feu Bemba père. Je ne sais pas comment vous avez su décliner son offre sans l’offenser !
— Je n’ai pas senti de colère en lui, seulement de l’incompréhension, si je me souviens bien.

Lydia entre à ce moment dans le bureau avec les boissons. Pendant qu’elle nous sert, je parcours la pièce des yeux. Elle ressemble à ces bibliothèques dans les manoirs anglais, feutrée, avec des tapis épais, un bureau en acajou, des fauteuils club en cuir brun patinés par les ans, les fenêtres sont occultées par d’épaisses tentures gris-beige aux motifs assez vieillots, des centaines de livres sur des étagères, couvrent le mur en face du bureau jusqu’au plafond, une petite escabelle est posée contre un rayonnage. Des ...