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Le dernier des Gédail
Datte: 01/09/2019, Catégories: nonéro, délire, Humour Auteur: Domi Dupon, Source: Revebebe
... céleste », tellement on avait l’impression qu’il planait au-dessus de toute cette merde. Il m’avait donné un nouvel espoir mais les Boches l’ont eu aussi. Alors j’ai passé le reste de la guerre à chercher Vador pour lui faire la peau. Mais que tchi ! Quand je l’ai enfin retrouvé, les camarades s’en étaient déjà occupés. La guerre s’est finie et je suis toujours là avec mes fantômes alors que j’suis mort un vendredi de 1943 sur cette voie qui remontait vers l’Allemagne. Soudainement, l’homme repoussa son verre, se leva. — Mais il est tard, Monsieur, il faut que je rentre chez moi. L’homme parti, le barman s’adressa au client : — Désolé de vous avoir imposé ça, Monsieur, mais c’est chaque fois pareil. Il a besoin de raconter. — Quelque chose m’étonne ! — Quoi donc, Monsieur ? — Comme il raconte ! Il semblait parler d’un jeune homme, mais vu son âge, ça ne correspond pas. — Vous lui donnez quel âge ? — Pas loin de 70 ! — Ôtez-en 20, Monsieur. Ce drame a gâché sa vie et l’a vieilli prématurément. À son retour, Gédail faisait pitié. Ses cheveux avaient blanchi. On aurait dit un vieillard alors qu’il n’avait pas 30 ans. On l’a fêté en héros, décoré, mais quelque chose était mort en lui. À 25 ans, il se retrouvait seul. Sa famille, une vieille famille installée au pays depuis des générations, avait été anéantie. Il était le seul survivant. Il est le dernier des Gédail, et le nom va mourir avec lui. Le barman prit leurs verres sur le comptoir et les posa dans le bac derrière lui. S’adressant au consommateur qui se préparait à partir, il ajouta : — On pourrait écrire un livre sur sa vie, presque tourner un film… — Trop tragique et trop sordide, soupira George Lucas en rangeant son dictaphone dans sa poche. Il n’y a pas de happy end. Hollywood n’aimerait pas.