1. Les Parques 1/8


    Datte: 30/08/2019, Catégories: f, fépilée, policier, Auteur: Claude Pessac, Source: Revebebe

    ... Attendre, en se posant mille questions. Qui donc l’avait introduit là ? Il n’en avait pas la moindre idée. Aucun souvenir pour l’aider : la dernière chose qu’il se rappelait, c’était s’être assoupi. Sur son canapé. Pas dans un tuyau !
    
    Allait-on le laisser là ? Viendrait-on le délivrer, l’extirper ? Et pour lui faire subir quel sort, alors ? Quel traitement lui infligerait-on ? Allait-il mourir, à plat-ventre, sans linceul, dans ce tube immonde ? Une vengeance ? Mais qui ? Un de ses clients, mécontent, désaxé ? La liste pouvait être longue ! Des malades, l’avocat en comptait un sacré paquet dans sa clientèle ! Ou alors, Lebrac et Belaoui, dont il blanchissait les recettes et gérait leurs avoirs en leur absence ? Il n’avait jamais fait le moindre faux-pas ; ils n’avaient rien à lui reprocher ! Qui, alors ? Un jaloux ? Ou alors, une de ses salopes ?
    
    La peur remonta en lui comme une houle glacée. S’ajouta une sensation de fourmillement sur son dos : une bestiole, des insectes ? La peur se transforma en effroi. Des rats, ou pire des insectes, d’immondes scolopendres, des punaises infectes, des scarabées nécrophages allaient le recouvrir, le grignoter, lui manger les yeux, s’introduire en lui par tous ses orifices, le dévorer de l’intérieur ? Agité des tremblements irrépressibles, les yeux fortement fermés, les fesses serrées, le malheureux se tortilla autant qu’il le put, dans l’espoir de se débarrasser de cette ignominieuse vermine qu’il sentait grouiller sur son ...
    ... corps.
    
    Longtemps, indéfiniment !
    
    Jusqu’à ce qu’une écharde de bois s’enfonce douloureusement dans sa cuisse droite. Il cessa alors aussitôt de bouger et essaya de se calmer. Peut-être ces sensations n’étaient-elles qu’illusions, le résultat du courant d’air ?
    
    Un courant d’air !
    
    Oui, il sentait bien un filet d’air !
    
    Il n’était donc pas dans une niche ! Si l’air froid et humide circulait, c’est donc qu’il était bien dans un tuyau ! Et s’il n’avait pas d’issue devant lui, peut-être en existait-il une derrière lui ? Ouverte. Sans grille ?
    
    Cet espoir, si ténu qu’il fût, lui rendit du courage. S’arc-boutant, il entama une reptation arrière. La chose n’était pas facile dans cet étroit goulet, avec les bras et les mains coincés sous son corps. Très vite cependant, il sentit un vide sous ses pieds et comprit qu’il atteignait l’extrémité arrière de la planche sur laquelle on l’avait allongé. Il réalisa que cette planche, plate et large, lui faisait perdre un espace précieux dans le tuyau, circulaire. De fait, ses orteils touchaient à peine le fond au-delà de la plaque de bois. Ainsi donc, lorsqu’il aurait passé le bardeau, il aurait plus d’espace et sans doute pourrait-il passer ses bras sous son corps, ramener ses mains vers l’avant et ramper presque à quatre pattes, ou au moins sur les coudes.
    
    Avec une belle énergie, il recula encore. Ses genoux rencontrèrent d’abord le froid glacé de deux tubes d’acier mobiles qui roulaient sous ses pieds, puis le fond concave du goulet, ...
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