Quand résonne le bourdon
Datte: 31/07/2019,
Catégories:
fh,
hdomine,
historique,
policier,
Auteur: Claude Pessac, Source: Revebebe
... enchanteresses ; mais jamais, même dans les fables les plus folles, je n’ai vu jolie ravaudeuse s’acoquiner à un pauvre "fada" de cinq pieds huit pouces(Nota : environ 1,82 m). Aucun auteur n’a osé rapprocher deux êtres aussi dissemblables, ce serait là l’histoire d’une Belle et d’une bête, personne ne s’en laisserait accroire ! Tu es lumière, gaîté, agilité et joie, je ne suis que noirceur, lourdeur, laideur, néant, abîmes. Alors oui, pour sûr, ton départ me serait un déchirement immense, et pas seulement parce qu’entre deux coquins, tu m’offres un peu de joie. Mais parce que ton sourire, tes moqueries, ta lumière sont ma force pour endurer mon sort.
L’éternel sourire moqueur de Sylvette a disparu, laissant place à un air grave. La petite se pelotonne quelques instants contre le large torse de son compagnon, respire un grand coup avant de relever son visage, et avoue, les yeux embués :
— Arbogast, grand benêt, je ne comprends pas toujours tout ce que tu me racontes, tu causes parfois pis que le Révérend ou l’Astrologue de la Comtesse, avec des mots inconnus, tordus, bien trop savants pour moi. Mais j’aime la mélodie de ta voix profonde, la douce chanson de tes mots. Et jamais Arbogast, jamais au grand jamais, aucun galant ne m’a dit pareilles choses, si joliettes et si tendres…
Fébrile, la pauvrette voudrait sans tarder se pendre aux lèvres de son compagnon, mais de peur d’être rabrouée, préfère poursuivre ses explications. Craignant de succomber à une émotion ...
... trop puissante, elle reprend son ton habituel, autoritaire et moqueur :
— Écoute-moi bien, Bogass’, où te vois-tu noirceur, lourdeur et laideur, et je ne sais quoi encore ? Tu es grand, immense, plus grand que le fameux champion du Prince de Muncken-je sais plus quoi. Soit ! Et alors, ce n’est point là infirmité ! Tu domines les sots ! Et… tu serais laid ? Où vas-tu chercher cela ? Lorsque tu abandonnes ton masque de carême, tes grimaces, tu n’es peut-être pas aussi délicat et fringant que les précieux damoiseaux qui bourdonnent autour de la Comtesse, mais tu as bonne figure ! La bonne figure d’un honnête homme. Je ne devrais pas te le dire, mais que, demain, tu abandonnes tes grimaces, te redresses fièrement, te montres sous ton vrai jour et honnête apparence, et je gage que nombre de garcettes viendront sans tarder faire le siège de ta personne. Alors, je vais te dire, mon bonhomme, que le nouveau Comte me jette hors de ma masure, peu me chaut… si je peux venir m’abriter dans tes bras.
Abasourdi par ce romantique aveu, le colosse attendri ne sait comment réagir. Mais la jeune femme ne lui laisse d’ailleurs pas l’initiative :
— Et encore une chose ou deux, Monsieur l’espion du Révérend, toi qui vois tout, entends tout sans en avoir l’air, où as-tu vu que je t’accorde des faveurs "entre deux coquins" ? Combien de drôles as-tu comptés depuis le fameux soir où tu m’as cachée pour m’éviter les assauts des reîtres du Comte, où tu m’as confessée ta présence muette mais ...