Quand résonne le bourdon
Datte: 31/07/2019,
Catégories:
fh,
hdomine,
historique,
policier,
Auteur: Claude Pessac, Source: Revebebe
... lui ? interroge Sylvette.
Reprenant un instant sa posture et ses grimaces habituelles, le bonhomme explique :
— Arbogast est idiot, Arbogast est inoffensif, Arbogast peut aller où il veut, personne ne soupçonnera jamais Arbogast d’indiscrétion, et ça, ça l’arrange bien le bon Père quand il m’envoie fureter au château pour son compte…
Lui désignant un tonnelet au sol, Sylvette commande :
— Assieds-toi donc, grand benêt, j’attrape le tournis à regarder ainsi en l’air !
Docile, le colosse prend place sur le tonnelet. Aussitôt, la jeune femme l’assaille à nouveau :
— Maintenant, dis moi donc, pourquoi tu as peur… pour moi ?
Hésitant, Arbogast dodeline du chef avant de répondre :
— Avec la succession, la Comtesse pourra-t-elle encore te protéger ? Nul doute qu’elle n’aura plus les mêmes pouvoirs ! Après tout, elle n’est que la belle-mère du futur Comte. Et si celui-ci décide de te chasser de sa maison, qu’est-ce que tu deviendras ?
Visiblement inquiet et mal à l’aise, le vannier se tortille les doigts. Il baisse la tête, fixe ses galoches et murmure :
— Tu… Tu quitteras… les lieux…
S’approchant de lui, la jeune femme lui attrape le menton entre pouce et index, l’oblige à relever la tête, accroche son regard et demande, d’une voix adoucie :
— Ainsi donc, maraud, tu t’inquiètes pour moi ? Cela te ferait-il peine que je quitte le château ? Ce pourrait-il que ce grand échalas que voilà ait quelque inclination pour la petite ravaudeuse ? Le fada ...
... aurait donc un cœur ?
Ce disant, la jeunette s’assied prestement sur la cuisse de l’homme. Lui relâchant le menton, elle pose la paume de sa main sur la joue rugueuse de l’artisan. Celui-ci en ronronnerait d’aise mais la caresse ne s’éternise pas et la jeune fille poursuit, en lui pinçant la joue :
— À moins que ne t’inquiètes… pour toi ! A moins qu’il n’y ait juste là, crainte de perdre le bénéfice de certaines joyeuses privautés que t’octroie la noiraude !
Arbogast détourne vivement la tête pour échapper au pinçon et gronde :
— Tu sais que je n’aime qu’on t’appelle la Noiraude ! Pourquoi utilises-tu ce mot ?
— Bon, soit, je ne le dirai plus, mais toi, ajoute-t-elle en lui agitant un doigt menaçant sous le nez, tu cherches à te défiler en répondant à ma question par une autre ! Apprends que tu ne te joueras point de moi ! Réponds, pleutre, ordonne l’effrontée.
Arbogast secoue tristement la tête, ressasse comme il l’a déjà fait mille et une fois, l’impossible situation sans jamais entrevoir l’ébauche d’une éclaircie. Triste comme une pierre, il explique doucement :
— Petite fleur, j’ai parcouru maints grimoires à l’Abbaye, exploré les Écrits des Anciens, déchiffré toutes sortes d’histoires et des contes, voyagé grâce à eux dans les contrées les plus lointaines, du royaume d’Espagne aux confins de l’Orient, en passant même par ta Provence. Avec un certain Ulysse aux aventures extraordinaires, j’ai rencontré les monstres les plus effrayants et les fées les plus ...