Dylanesque
Datte: 22/05/2025,
Catégories:
fh,
jeunes,
amour,
nostalgie,
portrait,
amitié,
Auteur: Amarcord, Source: Revebebe
... jolies, d’ailleurs, le reste pas mal non plus. Il ne fallut pas très longtemps pour qu’apparaisse l’évidence : Fiona et moi maintenions une forme de distance, ou plutôt non, de prudence. Comme si on ne se pressait pas. Qu’on s’apprivoisait ! Nos regards jouaient à cache-cache, se dissimulaient, se cherchaient. Ce n’était plus tout à fait l’amitié ni la complicité, ce n’était pas non plus la timidité et encore moins un jeu, une tactique de séduction délibérée. C’était le trouble, l’autre nom de l’éveil du désir. J’aurais très bien pu faire le premier pas. Mais c’est bien elle qui me téléphona un mercredi midi de février où la neige était tombée en masse sur la ville pendant la nuit, la rendant méconnaissable.
— Jules ? C’est Fiona. Tu fais quoi ?
— Je glande.
— Moi aussi. Tu glandes dans quel coin ?
— Celui que tu me proposeras, puisque ça ressemble à une proposition.
Un rire résonna dans l’appareil, il dansait, léger et clair comme les flocons qui s’étaient posés sur les toits. Le front humide s’éloignait, une vague de grand froid sec allait suivre, et le ciel pur se révélait.
— On se retrouve à la plage ?
— Je prends mon maillot et j’arrive.
— J’avais plutôt envie de me balader dans la neige, tant qu’elle est là. Ça te dit ?
— Je prends mon maillot et j’arrive.
Son rire délicieux retentit à nouveau, avant qu’elle ne poursuive.
— Rendez-vous dans une heure à la sortie du métro Buttes-Chaumont. Le parc est tout près de ma piaule, et pourtant j’ai jamais ...
... été foutue d’y mettre les pieds. C’est idiot.
— C’est le jour où jamais ! Finalement je vais plutôt prendre les raquettes. À tout de suite.
Je mis mon plus beau jean, une paire de bottines montantes, j’enfilai ma vieille parka de surplus militaire élimée qui avait dû faire quelques guerres, et entamai mon long trajet en métro. Il y avait du monde sur la ligne 5 : avec la neige accumulée, la circulation était devenue chaotique. Changement à Jaurès, arrivée parfaitement synchronisée au point de rendez-vous : je l’aperçus au loin sur le trottoir, jolie comme un cœur, enveloppée d’un ample manteau trois quarts gris à large revers, d’une large écharpe de laine blanc cassé en large maille et de son bonnet à pompon assorti, d’où s’échappaient quelques mèches châtain clair. Loin d’être engoncée dans cet ensemble douillet, elle semblait danser en s’approchant, portée par de longues bottes de cuir noir à bouts arrondis inspirées par l’équitation.
— Ça te va bien, l’hiver. Une vraie reine des neiges. Moi j’ai l’air du roi des ploucs.
— Merci. Ça te plaît ? C’est nouveau, ou presque. Chiné en seconde main. Des pièces couture au prix du H&M. Quant à toi, tu as tort, tu es parfait. Masculin et sobre. Mais pas frileux, on dirait…
— M’en parle pas, je caille… Ce truc-là laisse tout passer : l’ennemi, le vent, la pluie, le froid. Mûr pour la réforme…
— Allez, viens, on se bouge, alors !
On se mit en route, mais avant de rentrer dans le parc, elle eut une inspiration en me voyant ...