1. Un 14 juillet bleu blanc sexe


    Datte: 07/05/2025, Catégories: fh, piscine, hotel, anniversai, amour, portrait, Auteur: Amarcord, Source: Revebebe

    ... moi, pour neuf semaines et demie ou davantage. Parfois elle m’appelle en longue distance, jamais depuis le même numéro, jamais depuis le même continent, et ses fantasmes défilent dans l’écouteur, de la haute couture érotique. Elle veut que je lui décrive tout : la couleur des murs, la hauteur des plafonds, la teinte de la lumière qui le baigne. Ce n’est pas une visite immobilière : c’est un petit théâtre intime où elle se matérialise à travers l’émotion de sa voix. Elle me décrit la sensation de ses pieds nus sur le parquet, le reflet de son corps qui apparaît dans le miroir, à peine voilé par un long fourreau de soie, et puis elle décrit mon ombre qui se glisse dans son dos, le frisson qui la traverse, mes doigts qui se posent sur ses épaules, les fines bretelles qui coulissent sur ses bras, le souffle de la robe qui s’abat, son souffle à elle qui se suspend, dans la chambre et à l’autre bout du téléphone, si loin, si proche… Nos mots se font murmures, férocement incarnés, à la fois tendres et graves, précieux et crus, et je vous jure qu’à ce moment-là, malgré la distance, je la contemple la gorge serrée, absolument nue et désarmée, je perçois sous mes doigts le frémissement de colombes de ses seins tendres, l’empreinte de leurs tétons dardés contre ma paume, je sens son parfum m’envahir, il a l’entêtante puissance du désir, et je la goûte aussi, encore et encore, jusqu’à lui arracher un petit cri, d’effroi et d’abandon mêlés…
    
    Mes pensées s’égarent, comme mes phalanges ...
    ... vagabondent sur l’épiderme de Nathalie. Quand avons-nous fait l’amour pour la dernière fois ? Dans quelle ville ? Dans quelle chambre d’hôtel ? Avec quelles prudences folles, comme si nous étions un couple illégitime craignant l’arrivée d’un huissier ?
    
    J’ouvre l’écran de mon ordinateur, paramètre toutes les procédures de sécurité, sur le canal habituel, réputé sécurisé. À tort : une passoire. Tant mieux. Une nouvelle session démarre.
    
    Je pousse sur le bouton « envoi » et mon rapport crypté s’enfonce dans les profondeurs du dark web.
    
    Il ne lui faudra qu’une fraction de seconde pour arriver sous les yeux de mon référent à Moscou, qui le traitera sans tarder, classant consciencieusement les rares éléments sensibles, comme ce mot de passe, dans le dossier. Un piège, bien sûr, lui seul le sait.
    
    Tout comme je sais moi-même que le Colonel Natalia Akhmatova postera ensuite secrètement sur un compte éphémère de l’application Signal quelques photos touristiques anodines, mais dont l’une indiquera la cachette où nos services pourront récupérer les précieuses cartes mémoire. Tous ces clichés de la capitale russe auront pour moi une couleur. Bleue, comme les yeux de mon plus brûlant agent double. Blanche comme la peur, celle que j’éprouve sans cesse pour elle. Rouge, comme la place Rouge, sur cette carte postale anonyme qui vient d’aboutir la veille dans ma boîte aux lettres.
    
    Je tire les tentures, gagne mon lit, convaincu que le sommeil, il me faudra aujourd’hui lutter pour le ...